Le Point

L’automobili­ste, nouveau pestiféré

- PAR SÉBASTIEN LE FOL

Au palmarès des personnage­s voués aux gémonies par l’esprit du temps, l’automobili­ste arrive en bonne place. Il dépasse désormais le chasseur. On le traite comme un fléau auquel il faut sensibilis­er la population. C’était le sens de la journée sans voitures, à Paris, dimanche 25 septembre. Il n’y a rien à sauver chez l’automobili­ste : il pollue, se montre individual­iste, refuse le vivre-ensemble… Et il a encore le toupet de fumer derrière ses vitres. Au cinéma, Chabrol a donné un visage à ce salaud : celui de Jean Yanne dans « Que la bête meure ». A contrario, le cycliste est paré de toutes les vertus. Il incarne le bien, la santé, l’écologie. On lui accorde le droit de prendre les rues à contre-sens et de passer au feu rouge. Pestiféré de notre époque, l’automobili­ste multiplie pourtant des efforts pour devenir un meilleur citoyen. Il roule au sans-plomb ou à l’électrique. Il fait des économies pour s’offrir une voiture autonome. Il s’est mis au covoiturag­e et le voilà immédiatem­ent soupçonné de vénalité. Malgré toute la haine qui se déverse sur lui, il ose encore se rendre chaque année au Mondial de l’automobile. Il y va à pied, car les rues lui sont désormais interdites. Ce pourrait être un dessin de Sempé épinglant l’absurde de notre ville contempora­ine. Quand on y songe, il est incroyable qu’une telle manifestat­ion puisse encore se tenir. C’est une invitation au vice et au crime. Que fait la police des moeurs ?

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