Pour François Hollande
Mon nouveau combat : la lutte contre l’illettrisme chez les journalistes et les hommes politiques. J’ai lu « “Un président ne devrait pas dire ça…” », de Gérard Davet et Fabrice Lhomme (Stock, 24,50 €), grands reporters au journal Le Monde. C’est un portrait vivace, coloré et ample de l’actuel chef de l’Etat, dont les auteurs ont recueilli les confidences pendant plusieurs années, confidences qui ont fait la une des grands médias à la sortie du livre en librairie. Presque tout le monde des journaux et des partis y a vu des déclarations scandaleuses du président sur sa vie privée, alors qu’elles sont on ne peut plus pudiques, et la divulgation de secrets d’Etat dont je n’ai pas trouvé trace. Ces bévues ont du reste assuré le succès du livre, ce dont je me réjouis pour son éditeur, Manuel Carcassonne, que j’ai rencontré au milieu des années 1980, chez Albin Michel, où j’officiais comme conseiller littéraire. C’était un jeune normalien qui hésitait entre deux vocations : l’édition et l’écriture. Il n’y avait aucun manuscrit sur mes étagères et j’avais les pieds sur le bureau : c’est sans doute ce qui a décidé Manuel à choisir l’édition. Il s’est vite rendu compte que le métier d’éditeur était plus absorbant que ce qu’il avait imaginé en me regardant ne pas le faire, mais ça ne l’a pas découragé, comme on voit.
L e l i v r e d e Davet e t Lhomme empêcherait François Hollande de se présenter à l’élection présidentielle pour accomplir un second mandat de cinq ans. Cette intox signée LR – « la vieille droite aux yeux crevés » , disait Mauriac –, avec dans les coins quelques paraphes des frondeurs du PS, nous a beaucoup occupés au cours des dernières semaines et m’a amené à me plonger dans ces 662 pages, moi qui m’étais juré, après les lectures éprouvantes de l’automne pour la remise du prix Renaudot, le 3 novembre – ou plutôt des prix Renaudot, car il y en a trois : le roman, l’essai et le poche –, de ne plus sortir de ma méthode thaïe (« Introduction au thaï », de Noonpackdee Watana Butori et Bernard G. Butori, Assimil). C’est à cause de l’écrivain Henri Lopes, ancien ambassadeur du Congo en France : l’autre soir, il m’a invité à L’Eléphant bleu (≈≈≈), le célèbre restaurant thaï de la rue de la Roquette. J’ai parlé thaï (pasathaï) avec la plus jolie des serveuses, ça m’a donné envie de revivre Bangkok.
A-t-on eu un président de la République plus intelligent que François Hollande depuis le général de Gaulle ? Dans le livre, chaque fois qu’il parle, c’est pour dire quelque chose d’intéressant. Ça doit être parce qu’il ne parle pas dans un micro. Sur la politique intérieure, la fonction présidentielle, les partis, les relations internationales, la vie privée, la sécurité, il est passionnant. Les autres hommes politiques se répètent et se la pètent ; il fait l’inverse.
J’adore son sourire de fausse modestie. Dans fausse modestie il y a modestie. Ce gros volume est une magistrale leçon de politique que doivent acheter tous ceux qui veulent en faire, en font ou en ont fait. Ils n’ont du reste pas attendu cette chronique : près de 200 000 exemplaires vendus. Il y a une justice, et elle est populaire