Le Point

Le sellier qui suspend le temps

Fort de ses acquisitio­ns, impose ses propres codes dans l’horlogerie.

- LAURENCE ALLARD

La consécrati­on. Hermès réunit désormais l’ensemble des compétence­s horlogères. Acquises au fil des ans, elles lui ont permis de se hisser au niveau des plus grandes manufactur­es avec cette excellence qui lui est propre.

Cet intérêt pour les montres n’est pas récent. Dès 1912, Jacqueline, une des quatre soeurs Hermès, porte à son poignet un bracelet en cuir qui enserre sa montre de poche. Entre 1926 et 1978, la maison noue des partenaria­ts avec Jaeger, Patek, Rolex... et lance des montres pour lesquelles elle apporte sa créativité et ses compétence­s de sellier. Mais c’est sous l’impulsion de Jean-Louis Dumas, président d’Hermès de 1978 à 2006, qu’un pas décisif est franchi avec l’installati­on des activités horlogères à Bienne, en Suisse. « Nous avons été la première société non horlogère à s’installer au coeur de l’arc jurassien, explique Laurent Dordet, directeur général de La Montre Hermès. Nous v o u l i o n s maît r i s e r l e savoir-faire. Une condition indispensa­ble pour nous différenci­er du marché. »

Les montres étant presque exclusivem­ent masculines, Hermès décide de s’adresser aux femmes en proposant un design en rupture. Le groupe fait appel à des talents d’exception comme Henri d’Origny – l’homme des cravates, notamment –, qui dessine la montre Arceau, un best-seller inspiré de l’univers équestre. Puis viennent les lignes Clipper, Cape Cod, Dressage…

En 1989, nouvelle étape, Jean-Louis Dumas nomme son neveu Guillaume de Seynes à la direction de La Montre Hermès pour développer des montres automatiqu­es et élargir la clientèle aux hommes et aux « vrais » amateurs de montres. En 2006, Hermès acquiert une participat­ion dans les mouvements Vaucher et installe un atelier de fabricatio­n de bracelets à Bienne. La maison rachète Natéber en 2012, fabricant suisse de cadrans, puis Joseph Erard en 2013, fabricant de boîtes. La boucle est bouclée et les premières montres dotées d’un mouvement maison sortent en 2012. S’ensuivront des montres à complicati­on et surtout la ligne Slim, entièremen­t manufactur­ée par le groupe.

La martingale ? « Nous apportons un style singulier inspiré de nos codes et élaboré par des talents qui connaissen­t bien notre maison, ce qui permet de proposer des produits qui nous ressemblen­t. Cela donne par exemple le modèle Arceau avec ses chiffres inclinés ou audacieux, l’Arceau Temps suspendu, Dressage l’Heure masquée », explique Laurent Dordet. Ou encore des surprises dans les montres métiers d’art. « Avec des techniques anciennes, nous en inventons des nouvelles comme l’émail ombrant cette année. »

Mais le coup le plus audacieux a été le partenaria­t avec Apple et la sortie d’une Apple Watch Hermès smart. Une alliance qui s’enrichit d’un nouveau modèle : la Manchette double boucle en veau Swift ou veau Epsom, inspirée d’une sandale emblématiq­ue dessinée par Pierre Hardy, directeur de création des chaussures et des bijoux d’Hermès. Le groupe entame l’ultime défi : entrer dans le cercle fermé de la haute horlogerie

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