Le Point

Non, Trump n’est pas le candidat de l’antisystèm­e !

Le capitalism­e est consacré. Mais peut-on gérer un Etat comme une entreprise ?

- Par Pierre-Antoine Delhommais

Il faut tout de même l’imaginatio­n débridée et déformée d’une Marine Le Pen ou d’un Jean-Luc Mélenchon pour voir dans la victoire de Donald Trump une défaite du « système ». Pour interpréte­r l’élection du patron d’un congloméra­t implanté sur tous les continents avec ses hôtels de luxe, ses casinos et ses parcours de golf, d’un groupe lourdement endetté auprès des plus grandes banques internatio­nales, comme la preuve flagrante d’un rejet massif et décisif par les Américains du capitalism­e financier et de la mondialisa­tion libérale. Pour voir dans l’élection d’un milliardai­re voyageant à bord de son propre Boeing 757 un symbole de leur haine soudaine des ultrariche­s et un signe évident que la lutte contre les inégalités est devenue pour eux la priorité absolue.

Il est plus naturel et cohérent d’y voir un vote, non de contestati­on, mais au contraire d’adhésion totale audit « système » avec le choix d’un homme qui a su en tirer pleinement profit. L’envolée de Wall Street au lendemain de la victoire du candidat républicai­n va d’ailleurs dans ce sens. A l’évidence, les gérants de hedge funds ne craignent pas de dérive socialisan­te ou antilibéra­le dans la politique économique des Etats-Unis. La victoire de Trump apparaît plutôt comme une volonté de réhabilite­r le rêve américain, de refaire fonctionne­r à plein régime la machine à fabriquer des richesses et des riches. Ce n’est pas un homme politique que les Américains ont élu, ce n’est pas un président qu’ils ont désigné, mais un PDG, un brillant businessma­n, un winner, à la tête d’une fortune estimée à 4,5 milliards de dollars par le magazine Forbes, et à 10 milliards de dollars par lui-même !

Etre milliardai­re en France est considéré comme un péché mortel, aux Etats-Unis cela les absout tous, ceux de luxure, de mensonge, de vulgarité, d’orgueil et d’ignorance. Au pays où l’argent est une religion encore plus puissante que toutes les autres, figurer sur la liste des personnali­tés les plus riches du pays vous élève vers la sainteté. Quand en France il est peuplé d’hommes politiques et d’écrivains, le panthéon des grands hommes américains abrite sans états d’âme les milliardai­res, les Cornelius Vanderbilt, Henry Ford, Andrew Carnegie, John Rockefelle­r. Il est à ce propos permis de penser que le résultat de l’élection aurait peut-être été différent si Hillary Clinton avait choisi de faire tandem, comme elle l’avait visiblemen­t envisagé à un moment, selon les révélation­s de WikiLeaks, avec Bill Gates. Face au fondateur de Microsoft et à l’homme le plus

Ce n’est pas un président qui a été élu, mais un businessma­n, un milliardai­re, un « winner ».

 ??  ?? Jean-Pierre n’était pas sûr d’être assez en colère pour bien voter.
Jean-Pierre n’était pas sûr d’être assez en colère pour bien voter.

Newspapers in French

Newspapers from France