Faire rêver
Pierre Lellouche, qui ont rejoint le cercle des sarkozystes, et plus récemment Valérie Pécresse. « Il avait des réticences à donner plus de pouvoir aux régions, car il se méfie des baronnies » , explique la patronne de l’Ilede-France, qui a préféré les charmes girondins d’Alain Juppé.
Et pour cause : Fillon demeure, au fond de lui, un « souverainiste ». Il en a fait l’aveu sur France 2. Mais d’un souverainisme très différent de celui de Marine Le Pen. En fait, l’homme de la Sarthe conçoit l’Europe comme le prolongement de la France, celle-ci devant, dans les dix ans, en prendre le leadership économique, moral et politique. Un positionnement qui fait enrager son adversaire Jean-Frédéric Poisson, qui revendique seul le titre de souverainiste. « François Fillon essaie d’endosser mes habits ! » s’insurge le président du Parti chrétien-démocrate (PCD).
Progression. Le Sarthois renoue aussi avec son conservatisme social en obtenant le soutien de Sens commun. Et là aussi, son souverainisme perce quand il promet aux partisans de la Manif pour tous qu’il sortira de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) si celle-ci ne lève pas l’obligation faite à la France de reconnaître les enfants nés de la gestation pour autrui. « Je veux que la CEDH soit réformée pour qu’elle ne puisse pas intervenir sur des sujets qui sont des sujets essentiels, fondamentaux pour des sociétés », lance Fillon, qui emboîte ici le pas de Marine Le Pen. La leader frontiste avait ouvert la voie sur ce terrain en appelant la France à « couper le cordon » avec la CEDH sur les affaires de GPA.
C’est donc sur la frange droitière de l’électorat républicain que Fillon mord les mollets de Sarkozy, distance Le Maire et dénonce, en même temps, l’ « extrême prudence » du programme de Juppé. Notre baromètre Ipsos atteste de cette progression aussi bien vers l’extrême droite (il gagne 9 points de popularité chez les sympathisants FN), mais aussi vers le centre, dont Juppé est le champion : 66 % d’opinions favorables auprès de l’électorat MoDem (+ 11 points). Fillon et Juppé se disputent le créneau du « sérieux ». Auprès des retraités, Fillon, avec 62 % (+ 12 points), talonne Juppé quand Nicolas Sarkozy est à la remorque.
Entre les deux anciens Premiers ministres, le ton monte. Fillon avait attaqué son aîné en prédisant « une immense déception si Juppé est élu » . Juppé a répliqué lundi matin en qualifiant d’ « illusoire » la suppression de 600 000 fonctionnaires prônée par Fillon. Pour Gilles Boyer, le directeur de campagne d’Alain Juppé, « Fillon a l’audace de celui qui n’aura pas à appliquer son programme ». Sait-on jamais…