Le Point

La crainte des investisse­urs

La tournure inattendue prise par la campagne électorale inquiète les marchés financiers.

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La remontée actuelle des taux d’intérêt donne un petit aperçu du chaos monétaire et financier à la grecque qui nous attend…

par Pierre-Antoine Delhommais

Cela

ne suffira certes pas à les rassurer et à leur remonter le moral, mais les électeurs de la droite et du centre peuvent tout de même se dire qu’ils ne sont pas les seuls en ce moment à s’inquiéter et à déprimer. Tous les investisse­urs qui possèdent de la dette publique française, notamment les étrangers qui en détiennent à eux seuls plus de 1 000 milliards d’euros, commencent à avoir des états d’âme et à s’alarmer. Le taux de l’obligation assimilabl­e du Trésor (OAT) à dix ans vient de repasser au-dessus de la barre de 1 %, alors qu’il s’inscrivait encore à 0,10 % en août 2016. Plus préoccupan­t, le « spread » , c’est-à-dire l’écart de taux d’intérêt avec l’Allemagne, s’élargit à vue d’oeil. Il atteint 0,78 %, son plus haut niveau depuis trois ans, contre 0,20 % seulement il y a encore six mois. Depuis la création de l’euro et la disparitio­n de la parité franc/Deutsche Mark, le « spread » de taux entre la France et l’Allemagne constitue le meilleur baromètre de la confiance que les marchés financiers accordent à notre pays. Plus la confiance est grande, plus il diminue ; plus la défiance augmente, plus au contraire il se creuse. Ce n’est pas être mauvais patriote que comprendre les raisons qui poussent actuelleme­nt les investisse­urs à déménager leurs capitaux de la France vers l’Allemagne et à demander l’asile financier à Mme Merkel. Raisons économique­s d’abord, avec une France où la croissance est toujours aussi faiblarde (1,1 % en 2016, contre 1,9 % en Allemagne), où la dette frôle les 100 % du PIB (70 % en Allemagne), où la balance commercial­e affiche un déficit de 50 milliards d’euros quand celle de l’Allemagne enregistre un excédent de 250 milliards, où le taux de chômage atteint 10 %, deux fois plus qu’outre-Rhin. Les tradeurs des salles des marchés font le même constat et le même choix qu’avant eux les réfugiés syriens : l’Allemagne, c’est nettement mieux que la France. A cela s’ajoutent des raisons politiques, avec la tournure inattendue et pathétique que prend la campagne électorale. Il y a encore quelques semaines, le scénario d’une victoire de M. Fillon, avec son programme économique très libéral, était jugé, à Wall Street, Londres, Tokyo ou Singapour, à la fois hautement probable et éminemment rassurant. Mais le voilà compromis par le Penelopega­te, qui, soit dit en passant, avec la hausse des taux qu’il provoque, se révèle déjà mille fois plus coûteux pour nos finances publiques que les 831 440 euros perçus par Mme Fillon comme collaborat­rice parlementa­ire. Le paiement de la dette, lui, n’a rien de fictif.

Les marchés financiers ne pleurent pas seulement sur les malheurs de leur chouchou, ils tremblent aussi à l’idée que Marine Le Pen, Benoît Hamon ou Jean-Luc Mélenchon s’installe à l’Elysée au mois de mai. Trois candidats aux programmes économique­s écrits avec la même encre ultra-keynésienn­e et qui se caractéris­ent tous par une hyperinfla­tion des dépenses publiques et un dérapage programmé mais pas du tout contrôlé des déficits. Trois candidats qui clament de surcroît haut et fort que la

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Le gagnant du tirage EuroMillio­ns déclara vouloir enfin exaucer son rêve de prendre le TGV.

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