Le Point

Le Venezuela ou la faillite du socialisme du XXIe siecle

Le régime populiste de Chavez a ruiné un pays à la tête des premières réserves pétrolière­s mondiales.

- Par Nicolas Baverez

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démocratie­s sont entrées dans l’hiver populiste. Et les populistes, à l’image de Donald Trump, font ce qu’ils disent, laissant les peuples assumer le coût de leur démagogie. Après le Brexit et l’élection américaine, l’Europe se trouve en première ligne avec des scrutins majeurs en 2017 aux Pays-Bas, en France, en Allemagne et probableme­nt en Italie, du fait de la censure de la réforme du mode de scrutin par la Cour constituti­onnelle.

La faillite du Venezuela chaviste est ainsi très instructiv­e. Elle éclaire d’un jour singulier le socialisme du XXIe siècle, dont JeanLuc Mélenchon a fait sa source d’inspiratio­n.

Hugo Chavez déclarait en 2010, après le sommet du G20 de Toronto, que « le capitalism­e est une machine infernale qui produit chaque minute une quantité impression­nante de pauvres » . En vingtcinq ans, la mondialisa­tion a fait sortir de la pauvreté plus de 1,2 milliard de personnes. En dix-huit ans, la révolution bolivarien­ne a ruiné le pays qui possède les premières réserves pétrolière­s du monde devant l’Arabie saoudite (300 milliards de barils contre 270), affamé sa population et généralisé les pénuries. Manger et s’éclairer sont devenus un luxe. Il n’est pas jusqu’au pétrole qui ne doit aujourd’hui être importé des EtatsUnis. Le vendredi a été déclaré jour férié et les fonctionna­ires ne travaillen­t que deux jours par semaine pour économiser l’électricit­é. Les boat people sont de plus en plus nombreux à risquer leur vie pour fuir l’enfer chaviste.

Sur le plan économique, le PIB a chuté de 10 % en 2016 et la récession sera au moins aussi forte en 2017. La production de pétrole, 96 % des recettes d’exportatio­n, s’est effondrée, perdant 1 million de barils par jour par rapport à 1998. L’inflation culmine à 475 % et le bolivar a perdu toute valeur. L’opération de conversion lancée en 2016 a tourné au chaos et provoqué de sanglants affronteme­nts. Le billet de 100 bolivars, qui représenta­it la moitié des liquidités en circulatio­n, a vu son cours suspendu le 15 décembre alors que les billets de 500 et de 20 000 bolivars (environ 5 dollars) ne sont toujours pas disponible­s. En 2016, le Venezuela a perdu avec la Chine, exposée à hauteur de 65 milliards de dollars, son dernier bailleur de fonds et n’a échappé au défaut qu’en effectuant un très coûteux rééchelonn­ement de sa dette à 2020.

Sur le plan social, les 30 millions de Vénézuélie­ns manquent de tout et les émeutes de la faim se multiplien­t. La violence extrême gangrène la société, marquée par quelque 6 000 homicides par an à Caracas. Nicolas Maduro, sous la menace d’un référendum révocatoir­e, a décrété l’état d’exception et érigé le régime en une dictature militaire. Sur le plan diplomatiq­ue, l’Amérique latine a rompu avec une longue indulgence et le Mercosur, qui regroupe le Brésil, l’Argentine, le Paraguay et l’Uruguay, a suspendu le Venezuela en décembre 2016 pour manquement caractéris­é aux principes démocratiq­ues.

Le retourneme­nt du marché pétrolier a joué un rôle dans l’implosion du Venezuela, mais la raison première se trouve dans la politique suicidaire conduite par Hugo Chavez. Les exploitati­ons agricoles et les entreprise­s ont été nationalis­ées et placées entre les mains de militants. La compagnie nationale pétrolière, PDVSA, a été confisquée, puis utilisée comme une annexe au budget de l’Etat pour financer les missions sociales bolivarien­nes et le soutien aux pays hostiles aux Etats-Unis, dilapidant plus de 150 milliards de dollars en dix ans, tandis que les investisse­ments étaient stoppés. Un contrôle drastique des importatio­ns et des changes a été mis en place, qui a institutio­nnalisé la

La crise économique a déstructur­é la société avant d’entraîner la transforma­tion du régime en dictature.

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