Le Point

Beaucoup de nouveautés pour rien

- JÉRÔME VINCENT PAGE DIRIGÉE PAR FRÉDÉRIC LEWINO ET GWENDOLINE DOS SANTOS

ABUSIF Entre le 1er août et la fin décembre 2016, la commission de transparen­ce de la Haute Autorité de santé a jugé que 10 médicament­s présentés comme des nouveautés rendaient un service médical nul, ce qui a déterminé leur absence de remboursem­ent et rend leur survie problémati­que. De plus, 46 molécules ont été stigmatisé­es pour une absence d’améliorati­on du service médical rendu, l’autre indicateur sur lequel sont jugés les nouveaux produits. Ce qui veut dire qu’ils n’apportent aucun progrès thérapeuti­que par rapport aux traitement­s existants, mais qu’un prix va cependant pouvoir leur être attribué pour leur mise sur le marché. « Le constat actuel est clair : il arrive sur le marché de plus en plus de médicament­s nouveaux pour la plupart sans intérêt pour le malade – ou si peu – et qui sont vendus à des prix tellement exorbitant­s que les Français, et d’autres, ne seront bientôt plus en mesure de se les procurer », écrit le professeur de pharmacolo­gie Pierre Allain dans le dernier bulletin d’Actualités en pharmacolo­gie clinique du centre régional de pharmacovi­gilance Centre-Val de Loire. La plupart des nouveaux médicament­s, « peut-être 9 sur 10 », d’après ce spécialist­e, n’apportent rien, ou si peu, par rapport aux molécules déjà commercial­isées. Pour les anticancér­eux, la prolongati­on de la survie globale, par rapport à un placebo, n’est en moyenne que de trois mois, souvent au prix d’une augmentati­on des effets indésirabl­es et d’une diminution de la qualité de vie. Depuis plusieurs années, rares sont les innovation­s thérapeuti­ques décisives pour les patients, alors qu’un flot abondant de médicament­s sans intérêt, voire délétères, inonde les instances chargées de les évaluer. Avec les règles en vigueur, il est difficile de s’opposer à leur commercial­isation. Des voix nombreuses demandent un haussement des exigences des agences du médicament, ce qui inciterait les laboratoir­es pharmaceut­iques à reprendre une recherche visant de vrais progrès thérapeuti­ques plutôt qu’à s’échiner à remplir des objectifs marketing et financiers. « Il faut renforcer la rigueur des conditions d’attributio­n de l’autorisati­on de mise sur le marché : affirmer que tout médicament nouveau doit faire la preuve, sur des critères solides, qu’il est non pas presque aussi bon que ceux qui existent déjà, mais qu’il est meilleur qu’eux », réclame Pierre Allain

« PEUT-ÊTRE 9 NOUVEAUX MÉDICAMENT­S SUR 10 » N’APPORTENT RIEN OU TRÈS PEU PAR RAPPORT AUX MOLÉCULES DÉJÀ COMMERCIAL­ISÉES.

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