Verna, l’extraordinaire
«Vous n’êtes pas un peu beaucoup maquillé ? – Non. » Tel est le titre de la rétrospective magnifique que le Mac Val de Vitry-sur-Seine consacre à Jean-Luc Verna, l’artiste français dont le nom se chuchote depuis trente ans à l’oreille des collectionneurs et auquel jamais encore aucun grand musée n’avait accordé la place qu’il mérite. Trop maquillé ? Trop nu ? Trop sexe ? Trop bad ? Trop boy ? Trop doué ! « Je reste à la peau des choses », dit cet over-terrestre qui est une oeuvre en soi, entièrement tatoué, son sourire barré d’acier, des pupilles étranges et une douceur surprenante dans la voix. Aux murs, entre autres surprises, la série des oiseaux, dont la perfection évoque Fabritius ou Odilon Redon : « Le dessin est à la base de tout, il me permet de me réinventer. » Verna dessine sur des bouts de papier, décalque ce dessin, le transforme, le photocopie, le transfère sur un support qui sera dévoré par un puissant détachant. Métaphore parfaite de l’art et du temps.
Ce géant a vécu dans une cabine téléphonique quand il était à la rue, a été accepté à la Villa Arson, l’école des beaux-arts de Nice, tant ses dons s’imposaient, et fait feu de tout art : cinéma, photo, danse… Il « performe » à poil, exhibant son sexe « hardemment », ou rejoue les rôles des films de Kubrick ou Zulawski. « Mon corps anarchiste, mon allié… » Verna tutoie Shakespeare : le monde est sa scène et dans cette folle exposition où le visiteur va d’étonnements en éblouissements le sol scintille dans la pénombre. Au centre, une tombe en marbre noir (la sienne). Verna maquillé ? Comme une vie pas volée