Les centristes réclament des « signes d’affection »
Une éclipse est toujours passagère. Celle des centristes aura duré quelques jours. L’UDI s’est sentie violentée lorsque le candidat Fillon est parti en croisade contre les juges. JeanChristophe Lagarde, son président, était prêt à se tourner vers Alain Juppé. Interrogées par Paris, environ 80 % des fédérations étaient disposées à passer avec armes et bagages chez Juppé. « Emmanuel Macron, lui, ne recueillait que 10 % des fédérations UDI » , glisse-t-on au siège. Mais voilà, Fillon n’a pas été abattu et les centristes sont bien obligés de préserver leurs intérêts. Mardi soir, la proposition de résolution qui circulait chez les dirigeants esquissait un retour en crabe. D’abord, l’UDI voudrait s’assurer de l’essentiel et signer l’accord électoral des législatives négocié avant la crise : 96 circonscriptions garanties à l’UDI et 38 primaires pour se départager entre LR et UDI. Mais, surtout, l’UDI attend dorénavant que François Fillon lui montre des « signes d’affection » . Son discours du Trocadéro est très mal passé chez les ténors de l’UDI quand le candidat LR s’en est pris aux « socialo- centristes » … Concrètement, à l’UDI, les blessures se soignent volontiers par des postes, en l’occurrence dans l’état-major de campagne, voire par des promesses de maroquin. Jean-Louis Borloo, fondateur de l’UDI soi-disant retiré de la vie politique, aurait, jusqu’à récemment, offert ses services. Le fameux dimanche où il devait dîner avec Macron, c’est finalement avec Fillon qu’il a passé deux heures. Anne Méaux, sa grande
Sarkozy, mais hésitent à rompre franchement. Accoyer, par exemple, se rend au Trocadéro, mais évite de monter sur la tribune. A Aubervilliers, le jour de son 63e anniversaire, François Fillon semble absent de son discours, malgré les « joyeux anniversaire, François », entonnés par les militants. La veille, Le JDD a publié la lettre de démission de son directeur de campagne, Patrick Stefanini. Comment tenir ? Fillon se pose la question, mais jamais son corollaire : dois-je tenir ? Celle-là ne semble pas lui effleurer l’esprit, jure un intime.
Désemparé. Pourtant, devant la salle à moitié vide des Docks de Paris, ce 4 mars, il paraît désemparé. Ce devait être le lancement de sa nouvelle campagne, un moment fort. Au lieu de cela, les journalistes guettent le signe de sa capitulation. Il expédie son allocution en trente minutes et, dans la coulisse, ne peut s’empêcher de compter les absents. Eric Woerth, pourtant chargé du projet, n’est pas au rendez-vous. Son vague à l’âme est tel que le 5 mars, au Trocadéro, Bruno Retailleau décide de lui offrir un bain de foule qu’il espère revigorant, n’hésitant pas à dévisser à mains nues une barrière de police qui sépare Fillon du public. « Ça lui a fait beaucoup de bien de voir tous amie, avait réussi à persuader l’ancien ministre de l’Environnement de faire faux bond au jeune Macron. Selon nos informations, Borloo s’était proposé pour Matignon… On ne sait ce que Fillon lui a répondu, mais, le week-end dernier, c’est encore Borloo qui tentait de jouer les médiateurs entre Fillon, Sarkozy et Juppé. Un centriste utile ou une mouche du coche ? On ne sait trop encore
ces gens venus pour le soutenir » , assure son nouveau porte-parole, le député de l’Ain et ancien soutien de Bruno Le Maire, Damien Abad. Mais l’absence de poids lourds tels que Valérie Pécresse, Xavier Bertrand ou Gérard Larcher l’a secoué. « Il pense que les élus sont indispensables, admet l’un de ses fidèles. En cela, il reste un pur produit du système. » Contrairement à ce qu’il est obligé d’affirmer pour faire bonne figure en ces temps troublés, Fillon considère qu’il a besoin d’eux. Pour le représenter partout en France, pour labourer un terrain où il rechigne à aller, pour ripoliner un peu son image de « pilote de la Germanwings isolé dans sa cabine » , dixit un sarkozyste…
D’ailleurs, dès le jeudi matin suivant sa conférence de presse, il a pris soin de réunir autour de lui, dans son vaste bureau, sept hommes et femmes sur lesquels il souhaite s’appuyer pour la suite. Alors qu’à ce moment-là les juppéistes oeuvrent pour trouver les
Comment tenir ? Fillon se pose la question. Dois-je tenir ? Celle-là ne semble pas lui effleurer l’esprit, jure un intime.