Le Point

Avec vue sur l’Ago

Trois hôtels, trois adresses qui cultivent l’art de l’épure et du raffinemen­t, au coeur de la nature.

- PAR NATHALIE NORT

Depuis la gare de Kashikojim­a, la route finit ici en un ruban d’asphalte parmi les érables et les cerisiers. Entre les pavillons à flanc de colline, la baie d’Ago étale ses reflets d’argent autour d’îles et de radeaux perliers. Nous sommes loin au sud de Kyoto, dans le Kansai, à l’extrême est de la péninsule montagneus­e de Kii. Sous nos yeux se déploie le spectacle d’une nature vénérée par les Japo- nais, une terre de pèlerinage ignorée des Occidentau­x. Mille temples se nichent dans les forêts escarpées où l’on vient implorer les bonnes grâces des kamis, esprits légendaire­s du shinto. Ici commence les chemins du Kumano kodo, anciennes routes pavées classées au Patrimoine mondial de l’Unesco pour la beauté des paysages et des sanctuaire­s alentours.

L’arrivée à l’Amanemu – aman, « paix », en sanskrit, et nemu, « joie », en japonais –, fidèle aux préceptes de l’enseigne hôtelière Aman, se fait au rythme de l’omotenashi, la tradition de l’accueil propre au ryokan. Il est temps de suspendre le temps et d’élever son esprit. L’architectu­re basse, tout en bois de cèdre, est celle des fermes ostréicole­s de la région. Des pontons et de larges baies propices à la contemplat­ion s’ouvrent sur l’horizon.

Dans la pure tradition, Amanemu cultive le rituel du onsen, ce bain cher aux Japonais depuis la nuit des temps. Sur ces terres volcanique­s (le pays compte plus de 3 000 stations thermales), les sources d’eau chaude riche en potassium purifient le corps et l’esprit et rééquilibr­ent les énergies. Le spa propose un parcours en plein air , où l’on s’immerge dans plusieurs bassins d’eau chaude guère inférieure à 41 °C. Watsu, yoga ou soins du kampo, l’immémorial­e science des plantes, libèrent stress et tensions. Chacune des 24 suites (99 mètres carrés) et des 4 villas (300 mètres carrés) possède d’ailleurs son propre onsen avec sa cuve de basalte, lieu rêvé pour admirer l’ultime course du soleil sur la baie tout en prenant soin de son grain de peau.

Comme à l’Aman Tokyo – à ce jour le seul hôtel urbain de la chaîne Aman, ouvert en 2015 –, l’architecte australien Kerry Hill a privilégié l’épure et la noblesse des matériaux. Zen oblige, rien ne vient troubler ces lignes contempora­ines sobres et droites. Chaque pièce, habillée de chêne clair et de calmes claustras, célèbre l’art du kumiko [travail de treillis raffiné réalisé sur les portes coulissant­es, NDLR], que des génération­s d’ébénistes peaufinent sans clous ni colle. Sous le toit des terrasses, dans le grésil des criquets, on pense à Junichiro Tanizaki et à son « Eloge de l’ombre ».

Ici, la cuisine chavire les sens, surtout si l’on confie son palais aux surprises de l’omakase, qui donne carte blanche aux 12 chefs. Algues, crustacés et chairs iodées rivalisent avec le boeuf wagyu, l’autre star de cette région réputée pour

son microclima­t et ses vergers. Le moritsuke, l’art de présenter les mets, et la délicatess­e de la vaisselle font de chaque plat un tableau dans lequel on plonge avec émotion.

D’ailleurs, on ne manquera pas la rencontre avec les mythiques ama, ces fameuses championne­s d’apnée, jadis employées dans les fermes perlières de Mikimoto. Aujourd’hui, elles perpétuent la pêche aux ormeaux, même au plus froid de l’automne, butin qu’elles jettent ensuite sur les braises de leur hut, devant des gourmets ravis. Un pur moment de grâce

Amanemu, à partir de 785 € la nuit en suite, www.aman.com. Paris-Tokyo avec Ana, à partirp de 555 € l’A/R, , www.ana.fr. 4 nuits (dont 3 à l’Amanemu), à partir de 5 655 €/pers. (base 2), vols et transfe transferts inclus, 01.55.35.00.30, www.tselana.com.www. tselana. com.

 ??  ?? L’une des quatre villas (300 mètres carrés) de l’Amanemu, ouvertes sur un jardin privé.
L’une des quatre villas (300 mètres carrés) de l’Amanemu, ouvertes sur un jardin privé.
 ??  ?? A l’Amanemu, tout invite à la contemplat­ion. En témoignent les larges baies de l’établissem­ent.
A l’Amanemu, tout invite à la contemplat­ion. En témoignent les larges baies de l’établissem­ent.
 ??  ?? L’enseigne se livre au rite de l’« omakase », qui donne carte blanche aux 12 chefs.
L’enseigne se livre au rite de l’« omakase », qui donne carte blanche aux 12 chefs.
 ??  ?? La région du Kansai, dans la péninsule de Kii, est riche de fermes ostréicole­s.
La région du Kansai, dans la péninsule de Kii, est riche de fermes ostréicole­s.

Newspapers in French

Newspapers from France