Avec vue sur l’Ago
Trois hôtels, trois adresses qui cultivent l’art de l’épure et du raffinement, au coeur de la nature.
Depuis la gare de Kashikojima, la route finit ici en un ruban d’asphalte parmi les érables et les cerisiers. Entre les pavillons à flanc de colline, la baie d’Ago étale ses reflets d’argent autour d’îles et de radeaux perliers. Nous sommes loin au sud de Kyoto, dans le Kansai, à l’extrême est de la péninsule montagneuse de Kii. Sous nos yeux se déploie le spectacle d’une nature vénérée par les Japo- nais, une terre de pèlerinage ignorée des Occidentaux. Mille temples se nichent dans les forêts escarpées où l’on vient implorer les bonnes grâces des kamis, esprits légendaires du shinto. Ici commence les chemins du Kumano kodo, anciennes routes pavées classées au Patrimoine mondial de l’Unesco pour la beauté des paysages et des sanctuaires alentours.
L’arrivée à l’Amanemu – aman, « paix », en sanskrit, et nemu, « joie », en japonais –, fidèle aux préceptes de l’enseigne hôtelière Aman, se fait au rythme de l’omotenashi, la tradition de l’accueil propre au ryokan. Il est temps de suspendre le temps et d’élever son esprit. L’architecture basse, tout en bois de cèdre, est celle des fermes ostréicoles de la région. Des pontons et de larges baies propices à la contemplation s’ouvrent sur l’horizon.
Dans la pure tradition, Amanemu cultive le rituel du onsen, ce bain cher aux Japonais depuis la nuit des temps. Sur ces terres volcaniques (le pays compte plus de 3 000 stations thermales), les sources d’eau chaude riche en potassium purifient le corps et l’esprit et rééquilibrent les énergies. Le spa propose un parcours en plein air , où l’on s’immerge dans plusieurs bassins d’eau chaude guère inférieure à 41 °C. Watsu, yoga ou soins du kampo, l’immémoriale science des plantes, libèrent stress et tensions. Chacune des 24 suites (99 mètres carrés) et des 4 villas (300 mètres carrés) possède d’ailleurs son propre onsen avec sa cuve de basalte, lieu rêvé pour admirer l’ultime course du soleil sur la baie tout en prenant soin de son grain de peau.
Comme à l’Aman Tokyo – à ce jour le seul hôtel urbain de la chaîne Aman, ouvert en 2015 –, l’architecte australien Kerry Hill a privilégié l’épure et la noblesse des matériaux. Zen oblige, rien ne vient troubler ces lignes contemporaines sobres et droites. Chaque pièce, habillée de chêne clair et de calmes claustras, célèbre l’art du kumiko [travail de treillis raffiné réalisé sur les portes coulissantes, NDLR], que des générations d’ébénistes peaufinent sans clous ni colle. Sous le toit des terrasses, dans le grésil des criquets, on pense à Junichiro Tanizaki et à son « Eloge de l’ombre ».
Ici, la cuisine chavire les sens, surtout si l’on confie son palais aux surprises de l’omakase, qui donne carte blanche aux 12 chefs. Algues, crustacés et chairs iodées rivalisent avec le boeuf wagyu, l’autre star de cette région réputée pour
son microclimat et ses vergers. Le moritsuke, l’art de présenter les mets, et la délicatesse de la vaisselle font de chaque plat un tableau dans lequel on plonge avec émotion.
D’ailleurs, on ne manquera pas la rencontre avec les mythiques ama, ces fameuses championnes d’apnée, jadis employées dans les fermes perlières de Mikimoto. Aujourd’hui, elles perpétuent la pêche aux ormeaux, même au plus froid de l’automne, butin qu’elles jettent ensuite sur les braises de leur hut, devant des gourmets ravis. Un pur moment de grâce
Amanemu, à partir de 785 € la nuit en suite, www.aman.com. Paris-Tokyo avec Ana, à partirp de 555 € l’A/R, , www.ana.fr. 4 nuits (dont 3 à l’Amanemu), à partir de 5 655 €/pers. (base 2), vols et transfe transferts inclus, 01.55.35.00.30, www.tselana.com.www. tselana. com.