COMMENT ON RESSUSCITE UN PAYS
Thérapies. Canada, Suède, Pays-Bas, Allemagne… Tous ont su réformer en profondeur l’Etat providence et leur modèle social. Voici leurs méthodes.
Le pèlerinage aux Pays-Bas… c’était il y a un peu plus de vingt ans. Quelques semaines après leur entrée en fonctions à Matignon, Michel Rocard, Edouard Balladur puis, un an plus tard, Lionel Jospin ont chacun participé au même rituel. L’un après l’autre, ils sont allés chercher l’inspiration à cinq heures de train de Paris pour constater par eux-mêmes un miracle. Ils voulaient comprendre comment un pays doté d’un modèle social certes généreux, mais totalement en ruine avait réussi en quelques années à se réformer en profondeur. Le tout sans aucune manifestation et surtout avec succès. En ce milieu des années 1990, les Pays-Bas affichent en effet de très beaux résultats économiques. Mais ils reviennent de loin. Les Néerlandais ont échappé à la faillite. Dix ans plus tôt, le pays a frôlé le dépôt de bilan. Les dépenses publiques ont représenté jusqu’à 66,6 % du PIB (en 1983), un record jamais égalé, sauf peut-être en Union soviétique… Les effectifs de la fonction publique ont gonflé de 30 % entre 1970 et 1983. Quant au chômage, il dépasse 15 %.
Le miracle se produit à Wassenaar, dans la banlieue de La Haye. Plusieurs semaines d’affilée, les syndicats, les patrons et les politiques de gauche et de droite discutent autour d’un projet commun. Ils réalisent l’union sacrée contre la faillite du pays en taillant dans les dépenses publiques, tout en préservant l’architecture générale du modèle social. Les patrons acceptent de réduire le temps de travail, les salariés de baisser leurs salaires, les retraités d’amputer leurs pensions. Et l’Etat de couper dans ses effectifs pléthoriques et dans les filets sociaux, sans les supprimer complètement. Bien avant les réformes de Gerhard Schröder en Allemagne et sans copier Thatcher, les Pays-Bas ont donc mené à bien la première grande réforme de l’Etat providence.
C’est de cette belle mutation que Michel Rocard, Edouard Balladur puis Lionel Jospin souhaitent s’inspirer pour la France. Mais qu’ont-ils fait après