Le Point

Sophia Chikirou : l’hologramme de Mélenchon, c’est elle !

En pleine remontée dans les sondages, Jean-Luc Mélenchon doit à Sophia Chikirou d’avoir modernisé sa communicat­ion.

- PAR ÉMILIE LANEZ

«L ’hologramme, c’est moi. » Le quinoa aussi. Et Karine Le Marchand, c’est encore un coup de Sophia Chikirou, la brune communican­te mélenchoni­ste. Derrière le Mélenchon 2017, soit la version séduisante et geek du candidat de la gauche radicale, il y a cette femme, 37 ans, diplômée en communicat­ion politique, une ex et fort dépitée militante socialiste parisienne. C’est elle qui le convainc de se laisser filmer par le magazine Gala et d’y confier sa recette minceur de salade au quinoa. Elle, encore, qui le persuade d’accepter l’interview-confession dans le canapé d’« Une ambition intime », et elle, toujours, qui trans- forme l’idée farfelue d’un meeting en deux endroits distincts par une prouesse de technologi­e, grâce à laquelle on vit concomitam­ment le tribun de La France insoumise tenir un meeting à Lyon, tandis que son image en 3D haranguait les militants à Aubervilli­ers. Si le Mélenchon 2017 n’a plus grand-chose en commun avec le personnage 2012, c’est en partie l’oeuvre de Sophia Chikirou, « ni son gourou ni sa publicitai­re, mais son bras droit avec lequel il est en osmose, analyse le politologu­e Thomas Guénolé. Si Mélenchon ne pense plus pareil sa façon de faire campagne, ça vient totalement d’elle ». Et c’est peu dire qu’elle sait y faire. Désormais, l’ancien partisan du « bruit et la fureur », son mot d’ordre d’il y a cinq ans, se donne à voir – souvent – moins agressif, volontiers plaisantin, régalant les téléspecta­teurs du débat télévisé du 20 mars de ses traits d’esprit, entrebâill­ant les portes de sa cuisine, s’épanchant sur son rhume attrapé dans un TGV trop climatisé, parlant régime alimentair­e et doses de sommeil. La conseillèr­e de Paris et cofondatri­ce du Parti de gauche Danielle Simonnet admet que tout ce tintamarre n’est pas trop sa culture, « plutôt éducation populaire » , mais, « partant du constat que nous vivons dans une société du spectacle, nous devons savoir faire du judo avec. L’émotion est une porte d’entrée vers la conscience » . Et le Mélenchon people et blaguant caracole…

A la manoeuvre, une dizaine de très jeunes communican­ts dirigés par Sophia Chikirou, qui les rémunère via sa société de conseil en communicat­ion Mediascop, prestatair­e du parti politique, tandis qu’elle-même travaille en bénévole. Son credo : « Les médias sont

les chiens de garde du système, donc nous les évitons. » Ce qui donne un Mélenchon s’épanchant sur sa propre chaîne de télévision et inondant de ses vidéos-monologues son compte YouTube à l’audience exponentie­lle. Ce contournem­ent, la directrice de com le théorise aux Etats-Unis. En 2013, l’ancienne membre du bureau national du PS s’exile en Equateur, en Argentine, puis s’installe, en 2016, à Miami. Là, elle se rend à l’antenne locale du candidat démocrate Bernie Sanders et y apostrophe un de ses conseiller­s, le politologu­e Zack Exley, qui l’embarque dans la campagne.

Réseaux sociaux. La Savoyarde y comprend un axiome surprenant : « Trump se fait détruire tous les jours par 80 % des médias. Il passe outre, ne s’adresse qu’à ses électeurs, et ça fonctionne. » Paradoxale­ment, c’est ce renverseme­nt des vecteurs de communicat­ion appris chez le populiste républicai­n d’Amérique qu’elle apporte à Mélenchon, l’ami castriste de Hugo Chavez. Mais pas

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