Le Point

Récit (S. Pujas) : la parole à Clara Bow

Notre consoeur Sophie Pujas ravive le souvenir de cette star du cinéma muet. Piquant.

- PAR VICTORIA GAIRIN

Elle fut le modèle de Louise Brooks, l’amie de Joan Crawford, une muse pour Scott Fitzgerald. Pourtant, qui se souvient de Clara Bow, gosse de Brooklyn à l’espiègle carré rouquin, devenue la star de la Paramount au temps du muet ? « Nous sommes à Hollywood et aucun ange ne veille » , avertit d’emblée Sophie Pujas, journalist­e au Point. Dans les salles obscures, « l’enfant butée et impudente » s’invente la famille qu’elle n’a pas eue. Puis tente sa chance, comme on dit alors, dans cette « machine à broyer les êtres » qu’est en train de devenir l’industrie naissante du cinéma. Elle tourne avec Lubitsch, Dorothy Arzner, Josef von Sternberg et Frank Lloyd. Elle devient la coqueluche du cinéma mondial et de la toute jeune presse à scandales. Volontiers provocante, elle est la cible idéale. Indépendan­te, elle sera la première it girl, celle qui donne le « la ». Mais l’Amérique a la mémoire courte. Alors que le cinéma parlant s’impose, voilà les bobines d’hier oubliées à jamais. Sur les centaines de milliers de films muets tournés dans les années 1920 aux EtatsUnis, combien ont survécu ? Clara Bow n’en réchap- pera pas et cédera la place à Katharine Hepburn, Greta Garbo, Bette Davis, pour terminer sa vie au fin fond du Nevada. La plume vive et mélodieuse de Sophie Pujas nous embarque au coeur des Années folles et de l’âge d’or du jazz, à la rencontre d’un show-business qui avait encore un certain panache. De la ménagerie extravagan­te du producteur William Hearst au Jardin d’Allah – palace disparu dont la piscine en forme de mer noire dominait Hollywood –, du sourire de Gary Cooper aux bras réconforta­nts de Victor Fleming, elle rend aussi hommage aux pellicules égarées et aux inoubliabl­es victimes de la parole assassine. « J’appelle de mes voeux le Lubitsch perdu qui rendrait justice au piquant de Clara » , implore l’auteure. Qu’elle soit entendue

« Le sourire de Gary Cooper , de Sophie Pujas (Gallimard, « L’Arpenteur , 112 p., 11,50 €).

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 ??  ?? Années folles. Sophie Pujas décrit Hollywood d’une plume mélodieuse. A dr., Clara Bow dans « The Fleet’s In » (1928), de Malcolm St. Clair.
Années folles. Sophie Pujas décrit Hollywood d’une plume mélodieuse. A dr., Clara Bow dans « The Fleet’s In » (1928), de Malcolm St. Clair.

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