Turquie, le tournant historique
Avec la victoire du oui au référendum, Erdogan est tout-puissant.
Dans le gigantesque palais de 1 125 pièces (200 000 mètres carrés) que Recep Tayyip Erd o g a n s ’ e s t r é c e mment f a i t construire pour 350 millions de dollars, le téléphone n’arrête pas de sonner. Après le président hongrois, Viktor Orban, et le numéro un biélorusse, Aleksandr Loukachenko, Donald Trump a lui aussi félicité le président turc pour avoir remporté son pari.
Un peu plus de 51 % des électeurs ont soutenu son projet de changement constitutionnel renforçant considérablement ses pouvoi r s . Grâce à c e t t e vi c t oi r e , Erdogan pourra notamment rester jusqu’en 2029 (s’il remporte les élections, bien sûr). Il a la mainmise sur le Parlement, où il a désormais un droit de veto et dont le rôle se résumera à celui d’une chambre d’enregistrement. Le président turc disposera aussi d’un contrôle étroit sur la justice. Il pourra enfin proclamer l’état d’urgence sans l’autorisation du Parlement. Un changement radical par rapport à l’ancienne Constitution – postérieure au coup d’Etat militaire de 1980 –, où la fonction présidentielle était essentiellement honorifique et où le président devait se tenir au-dessus des partis.
Recep Tayyip Erdogan n’a pas traîné pour inaugurer ses nouveaux pouvoirs. Dès l’annonce de sa victoire, il a reconduit pour trois mois l’état d’urgence en vigueur depuis le putsch raté de juillet 2016. Il devrait également retrouver les commandes de l’AKP (il en avait abandonné la présidence en devenant le chef de l’Etat). Et pour bien se faire comprendre des Turcs, il a visité le mausolée de cinq dirigeants qui ont marqué l’histoire du pays, dont celui du sultan Sélim Ier et de Mehmet le Conquérant, le tombeur de Constantinople…
« Il est toujours difficile de choisir quelque chose de nouveau. Mais c’est un moment historique, un changement très sérieux pour l’avenir de la Turquie » , a expliqué Recep Tayyip Erdogan dès qu’il a pris connaissance de sa victoire devant ses militants. Au même moment, dans les rues d’Istanbul et d’Ankara, des milliers de manifestants dénonçaient « un vol électoral », mettant en cause le Haut Conseil électoral, qui a pris la décision de valider, le