Un naufrage nommé Hamon
Il se voyait en Sisyphe, heureux de pousser coûte que coûte le rocher qui lui avait fait gagner la primaire, un programme résolument à gauche. Seulement, loin d’une ascension vers les sommets, la campagne de Benoît Hamon a pris la tournure d’un chemin de croix. Dimanche soir, le socialiste a fait connaître à son parti sa plus lourde défaite électorale depuis 1969, en ne récoltant que 6,3 % des suffrages. Une débâcle historique pour un parti au pouvoir. Poussé fin janvier par une victoire qu’il devait autant à ses idées qu’au rejet de Manuel Valls et du quinquennat, le Breton a freiné sa campagne lui-même, en passant près d’un mois à concocter un accord avec les Verts et à multiplier les appels du pied à un Jean-Luc Mélenchon qu’il savait déterminé à mener sa barque seul. En parallèle, Hamon néglige toute une frange du Parti socialiste et ne cherche pas à rassembler autour de sa candidature. « En 2007, le PS s’était mis à distance de la candidate. Cette fois-ci, c’est le candidat qui s’est mis à distance du PS » , résume un haut dirigeant solférinien. Les réformistes de l’aile droite, ainsi que certains hollandais, n’attendaient qu’une baisse de quelques points dans les sondages pour organiser, au comptegouttes, leur migration vers Emmanuel Macron. Pourtant solide sur ses dossiers, irrécusable sur son éthique, Hamon perd définitivement pied lors du premier débat télévisé et voit Mélenchon le dépasser. Le pacte de non-agression avec le leader des Insoumis lui a probablement été fatal, comme l’explique un membre de l’organigramme : « On est entré dans un jeu de comparaison en indiquant que les différences idéologiques étaient ténues. Quand les courbes se sont croisées, il n’y avait plus de raison que l’on récupère les électeurs que l’on avait perdus. »