Le fabuleux mystère de la tiare d’or
Dans son nouveau roman, « Villa Kérylos », Adrien Goetz revient sur une rocambolesque affaire de faux qui secoua la République.
Musée du Louvre, un matin de printemps. Un long couloir, des dizaines de portes et, derrière l’une d’elles, dans le bureau de Cécile Giroire, la directrice adjointe du département des Antiquités grecques, étrusques et romaines, un trésor. Sur une table, un grand carton. Avec d’infinies précautions, on en sort une pièce d’orfèvrerie exceptionnelle, une beauté fragile tirée pour nous du sommeil des réserves, la « tiare de Saïtapharnès ». C’est un bonnet conique d’or pur repoussé dont le décor principal représente quatre scènes tirées de l’« Iliade » d’Homère. Une inscription en caractères grecs précise que cette coiffe a été offerte « au grand et invincible roi Saïtapharnès », un conquérant scythe du IIIe siècle avant Jésus-Christ, par « le conseil et les citoyens d’Olbia », une colonie grecque des bords de la mer Noire. C’est un objet sublime, un objet maudit. C’est un faux.
Cette tiare est nichée comme un abcès au centre de « Villa Kérylos », le nouveau roman d’Adrien Goetz. C’est lui qui nous la montre aujourd’hui au Louvre, privilège rare, en racontant avec gourmandise sa fascinante histoire qui en dit long sur les vertiges de l’érudition. Normalien, agrégé, historien de l’art et maître de conférences à la Sorbonne, Adrien Goetz s’est fait connaître par des romans qui tournent autour des plus rocambolesques histoires de l’art… souvent vraies. Après « La dormeuse de Naples » (prix des Deux-Magots, prix Roger-Nimier), où l’on enquêtait sur un tableau d’Ingres disparu, sa série policière des enquêtes de Pénélope (« Intrigue à l’anglaise », « Intrigue à Venise »…) mettait en scène une conservatrice de musée éponyme, flanquée de son fiancé journaliste prénommé Wandille, s’employant à percer les mystères de la tapisserie de Bayeux, du château de Versailles ou d’un tableau de Rembrandt sur une île de la Sérénissime. Dans « Villa Kérylos », l’oeuvre d’art est une maison. Une maison bien réelle, et d’ailleurs visitable, bâtie au début du XXe siècle à Beaulieu-sur-Mer, entre Nice et Monaco. Une villa d’inspiration grecque antique, une « folie » agrémentée du confort moderne, pas un pastiche ou une mascarade époustouflante comme il s’en édifia beaucoup à l’époque, mais une restitution scrupuleuse, rêve d’un helléniste richissime, Théodore, benjamin de la famille Reinach.
Nés dans une famille de banquiers juifs originaire de Francfort-sur-le-Main, les Reinach étaient