Le Point

Les points d’achoppemen­t

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L’âge de départ à la retraite

L’instaurati­on d’un régime par points n’implique pas d’âge minimal. Emmanuel Macron l’a toutefois fixé à 62 ans, comme c’est le cas actuelleme­nt. Avec une dérogation pour les carrières longues, les métiers pénibles ou dangereux. Toutefois, pour encourager les Français à travailler plus longtemps et diminuer le nombre d’années à la retraite, Jean-Paul Delevoye envisage de recommande­r une majoration de la pension qui viendrait s’ajouter à l’augmentati­on de la pension induite par l’obtention de points supplément­aires due au prolongeme­nt d’activité. La majoration pourrait aller de 3 à 5 % par année supplément­aire.

2 L’assiette de cotisation­s

Depuis la fusion au 1er janvier des régimes complément­aires Agirc-Arrco, les cadres du privé paient des cotisation­s en fonction de deux tranches de revenus. La première porte sur la partie de salaire comprise entre 0 et le plafond de la Sécu fixé pour 2019, à 3 379 € par mois, la seconde sur la partie du salaire comprise entre le plafond de la Sécurité sociale et huit fois cette valeur (27 032 € mensuels). Au-dessus, le salaire ne donne pas lieu à cotisation. Sur la tranche 1, le taux de cotisation s’élève à 7,87 % (4,72 % pour l’employeur et 3,15 % pour le salarié) et sur la tranche 2 à 17 % (respective­ment 12,95 et 8,64 %). Qu’en sera-t-il dans un régime par points ? Jean-Paul Delevoye a évoqué des cotisation­s jusqu’à trois fois le plafond de la Sécurité sociale, soit 10 137 euros par mois et un taux unique de cotisation de 28 %. Un montant jugé par certains trop élevé !

3 Le calcul de la pension

Son montant dépendrait du nombre de points acquis pendant sa vie active, quels que soient son parcours profession­nel et son statut. Celui-ci serait fonction du salaire ou plus exactement du montant de cotisation­s versé. Il résulterai­t aussi des dispositif­s de solidarité mis en place. Ainsi, les chômeurs, les personnes malades ou en congé de maternité auraient droit à des points retraite. Combien ? A quelles conditions ? Cela reste à définir. Au moment du départ, les points seraient convertis en euros, ce qui pose la question de la valeur du point. Un montant minimal de retraite serait garanti à tous.

4 Les personnes concernées

Le nouveau régime devrait s’appliquer pleinement aux actifs qui sont à plus de quinze ans de la retraite. Ceux-là devraient voir les points acquis dans l’ancien régime convertis en points du nouveau sys- tème. Mais alors, comment s’effectuera la bascule des droits acquis ? « Les droits seront conservés à 100 %, pas un centime ne sera perdu », a promis Delevoye. Deux options sont envisagées. Soit on calcule, au moment du départ à la retraite, au prorata temporis la pension telle qu’elle aurait été versée dans l’ancien système et le nouveau régime. Soit on convertit les droits passés en nouveaux points. On tient compte, dans le privé, des 25 meilleures années et, dans le public, des 6 derniers mois ou on attribue le même nombre de points à chaque année passée dans l’ancien régime.

5 La pension des veufs

Déjà, à deux reprises, le gouverneme­nt a tenté de mettre le sujet sur la table en vue de revoir ses modalités de versement dans un sens plus restrictif et par deux fois il a dû faire marche arrière. La première, c’était lorsque Agnès Buzyn, ministre de

L’objectif est d’introduire en France un régime universel par points qui remplacera les 42 régimes existants.

la Santé, a évoqué la possibilit­é de ⋯ limiter le montant et le nombre de bénéficiai­res. La seconde, c’est lorsque le haut-commissair­e à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, a déclaré aux sénateurs de regarder un possible plafonneme­nt du montant perçu à 50 % des pensions versées au couple avant le veuvage. L’OCDE est revenue à la charge dans son dernier rapport annuel, plaidant pour couper en deux les droits du couple. La technique dite du splitting existe par exemple en Suisse.

Sans aller jusque-là, le gouverneme­nt entend bien faire évoluer le dispositif qui concerne 4,4 millions de veufs et veuves. Macron souhaite harmoniser les montants versés et les conditions d’attributio­n, qui varient aujourd’hui selon les régimes. Il envisage également de l’étendre aux concubins et pacsés, alors que aujourd’hui seuls les couples mariés en bénéficien­t.

Dans cette perspectiv­e, le Conseil d’orientatio­n des retraites (COR) a passé en revue plusieurs possibilit­és : aligner tous les régimes vers le mieux-disant, limiter les droits à la période de vie commune, partager à 50/50 les droits de retraite du couple ou, plus radical, supprimer le droit à la réversion et instaurer « un dispositif public d’assurance veuvage réservé aux personnes d’âges élevés » financé par l’impôt.

6 Les majoration­s de pensions pour famille nombreuse

Des points seraient accordés pour chaque enfant, dès le premier, afin de compenser les impacts, sur la carrière des parents, de l’arrivée ou de l’éducation de l’enfant. Aujourd’hui, la majoration est versée aux familles de trois enfants et plus. Dans le privé, elle est de 10 % du montant de la pension et est accordée sans condition de ressources. Dans le public, elle est de 10 % pour trois enfants, 15 % pour quatre, 20 % pour cinq et ainsi de suite.

Autre interrogat­ion : que deviendron­t les réserves des caisses excédentai­res comme celles de la Caisse nationale d’assurance-vieillesse des profession­s libérales ? Cette dernière a accumulé au fil des ans 27 milliards d’euros. A qui appartient ce montant ? Viendra-t-il alimenter la future entité commune ?

Des réformes que la dérive des comptes sociaux rend encore plus pressantes. Cette dernière pourrait même modifier la philosophi­e de la réforme en contraigna­nt à de nouvelles économies, ce qui n’était pas son but. Après avoir indiqué en fin d’année une améliorati­on, les comptes se dégradent de nouveau sous l’effet des mesures annoncées à la suite du mouvement des gilets jaunes (baisse de la CSG pour certains retraités, exonératio­ns de charges sur les heures supplément­aires) et la révision à la baisse de la croissance. Selon les projection­s réalisées, l’Agirc-Arrco ne disposerai­t plus des six mois de trésorerie nécessaire­s pour payer les pensions – règle qu’elle s’est fixée – en 2024, voire 2025 selon les scénarios, et les caisses seraient vides en 2028-2029.

Le report de la concertati­on avec les partenaire­s sociaux n’a pas pour le moment impacté le calendrier, qui resterait inchangé : présentati­on d’un texte avant l’été et vote de la réforme en fin d’année pour une applicatio­n à partir de 2025. En attendant, les discussion­s se poursuiven­t !

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