Le Point

De l’amour maternel

- MARINE DE TILLY

Roman. « Je ne vais pas laisser des marmots vagissants m’interdire de faire des études et de voyager », écrivait la poétesse Sylvia Plath à sa mère en 1953. L’amour maternel serait-il un mythe ? Sylvie Le Bihan porte le fer dans la plaie avec un roman aux chapitres denses et vifs, sans manières, des phrases simples empreintes de poésie et de l’empathie. Une femme en crise d’identité, de féminité, de maternité se réfugie dans une maison mythique, étrange et rouge, à 32 marches au-dessus du monde et de la baie de Capri. « Giulia n’a hérité de sa mère que son prénom, italien, et son amour pour Malaparte », écrit l’auteure. Révoltée, révoltante, contestata­ire, affamée de liberté, elle avait abandonné Giulia le matin de sa naissance. Pourquoi? Créer, vivre, écrire, aimer, on ne sait pas : silence têtu, absence absolue. Devenue (trois fois) mère à son tour, universita­ire, célibatair­e, Giulia est invitée par un confrère à écrire un livre dans la villa du maître. Déçue par ses fils, qui ne lui sont pas reconnaiss­ants de son dévouement et de ses sacrifices, elle accepte, s’enfuit de Paris, s’installe à Capri. C’est l’histoire d’une mère enragée de l’être ou de l’avoir été, une histoire qui gifle et étreint à chaque page. Faut-il à tout prix contorsion­ner son corps et mater sa liberté pour entrer dans le moule? Puissant, dérangeant, ce roman soulève la question, courageuse et dangereuse, de l’amour maternel, peut-être moins souverain qu’on ne le croit

« Amour propre », de Sylvie Le Bihan

(JC Lattès, 248 p., 18,90 €).

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Quand Sylvie Le Bihan s’attaque au mythe de l’amour maternel.

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