Dans la « vallée de la Lune »
Californie. Jack London l’adorait. A Sonoma, l’anti-Napa Valley, on se gorge de vin et de beauté.
Depuis San Francisco, il est un itinéraire fameux que les locaux comme les touristes empruntent telle une promesse de bonheur. Après avoir traversé la baie par le pont du Golden Gate, la route 121 file plein est, pour laisser bientôt place à un embranchement qui offre au citadin revenu de tout deux types de plaisirs bien différents. A droite, Napa, ses vignobles réputés (dont celui de Francis Ford Coppola), ses restaurants étoilés et ses stars en villégiature façon Hamptons de la côte Ouest. A gauche, un authentique paradis perdu. Ce n’est pas nous qui l’affirmons, mais Jack London, qui, au faîte de sa gloire, trouva à Sonoma le bonheur auquel il aspirait depuis toujours. Lui qui avait parcouru les immen
sités neigeuses de l’Alaska et les eaux tumultueuses du Pacifique tomba en pâmoison devant l’harmonie sidérante qui enveloppait, et enveloppe encore, la « vallée de la Lune ». Ce fut en effet ainsi que l’aventurier baptisa, dans le roman du même nom qu’il publia en 1913 – trois ans avant sa mort –, cette vaste région qui se découpe en vallons délicats. Ces derniers sont encadrés par une chaîne de moyennes montagnes dont les flancs sont parsemés de vignobles et où, plus au nord, coule nonchalamment la bien nommée Russian River. Car, contrairement à une légende tenace, ce n’est pas de l’autre côté des montagnes, à Napa, que les premiers domaines viticoles firent leur apparition, mais dans la vallée de Sonoma, en 1812. Des émigrants russes y plantèrent, trente ans avant sa clinquante voisine, les premiers pieds de la région, où de spectaculaires amplitudes de température favorisent la culture de cépages fort variés. « Ce ne sont pas des terres que tu croiras contempler, mais un tableau ! » pourrait-on s’exclamer, à la façon de Pline le Jeune décrivant, au Ier siècle, l’écrin qui entoure sa villa toscane.
Sanctuaire. Ce rapprochement de Sonoma avec les paysages de l’Italie centrale n’est pas fortuit et a déjà été opéré par de nombreux voyageurs afin de décrire la merveilleuse beauté de la vallée, qu’une douce lumière, aux teintes tantôt ocre, tantôt rougeoyantes, colore selon les saisons. Jack London fit l’acquisition en 1905, dans la commune de Glen Ellen, d’une propriété de plusieurs hectares, sorte d’îlot utopique qu’il baptisa
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