Bien parler pour convaincre
Mode d’emploi. Argumentation et réfutation, silences et regard, posture et gestuelle, préparation et élocution : savoir (bien) s’exprimer n’est pas inné pour tous. Dans son hors-série consacré à l’éloquence, Le Point vous livre les secrets de l’art oratoi
LES ORAUX D’EXAMEN
Ce sont des mois, voire des années de travail, qui se jouent en quelques minutes. Comment ne pas manquer ce rendez-vous final ?
Préparez-vous
Renseignez-vous sur vos examinateurs pour déstresser et gagner des points : à qui aurez-vous affaire ? Quel est le rôle du jury ? Pourquoi fait-il passer des oraux ? Qu’attend-on de vous ?
Restez poli !
Ne prenez jamais de haut un examinateur. Frappez à la porte avant d’entrer. Dites-lui bonjour et au revoir. Ne vous asseyez pas tant que l’on ne vous y a pas invité. Essayez de sourire quand vous entrez dans la salle ; si vous n’y arrivez pas, ne vous forcez pas : vous avez le droit d’être stressé. Prenez la parole quand on vous la donne, quand on vous le demande. Si vous respectez ces règles élémentaires de politesse, vous marquez déjà des points car elles sont loin d’être respectées par tous.
N’apprenez rien par coeur afin de rester spontané
Vous devez savoir ce que vous allez dire, mais pas comment vous allez le dire. L’« improvisation préparée » vous permet d’être spontané : retenez simplement l’idée générale des différentes parties que vous allez aborder. Si vous apprenez votre texte par coeur, vous risquez de vous retrouver coincé par un trou de mémoire.
Soyez humble
Un orateur se doit d’être particulièrement modeste au cours d’un examen. L’examinateur peut prendre très rapidement en grippe un candidat qui n’a pas la bonne attitude. Si vous apparaissez comme arrogant, vous mettez la barre haut et devrez alors être très bon pour obtenir une note correcte. A contrario, en restant humble, vous ne pouvez que surprendre agréablement le jury.
Structurez votre propos
Vous devez construire le plan de la réponse à la question ou au sujet donné. Vous pourrez éventuellement en écrire les grandes lignes sur un papier, pour ainsi visualiser et anticiper chaque étape, ou même pallier une défaillance de votre mémoire. Un plan clair constitue également un repère pour votre examinateur : il suivra mieux votre propos et vous écoutera alors sans effort.
L’AUGMENTATION DE SALAIRE
Votre rémunération reflète la considération que l’on a pour votre travail. Si vous avez le sentiment d’apporter un plus à votre entreprise, il est temps de demander une augmentation.
Préparez-vous
Venez avec des arguments solides. Vous devez vous vendre et valoriser ce que vous avez réalisé, votre attitude, vos capacités à manager les autres, à vous organiser et votre façon de progresser.
Mettez en avant vos actions au sein de l’entreprise: l’amélioration de vos résultats, les projets que vous avez menés à bien, la bonne santé de votre service… Montrez que vous êtes l’avenir de l’entreprise.
Proposez le montant de votre augmentation
Réfléchissez à ce que vous souhaitez demander, sans quoi vous ne pourrez pas être pris au sérieux. Il faut que vous montriez que vous connaissez les salaires du marché. Le travail de recherche auprès des RH des concurrents est essentiel ! En fixant vous-même le point de départ de la négociation, c’est vous qui donnez le ton.
Trouvez le bon moment, pour vous comme pour vos supérieurs, pour faire votre demande. Sachez patienter.
Prenez un rendez-vous
Une augmentation de salaire ne se demande pas en coup de vent à la machine à café. Prenez un rendez-vous afin d’être tranquille et dans un cadre favorable. Si d’autres personnes vous entendent, cela peut vous mettre mal à l’aise et donc vous déstabiliser. C’est la même chose pour votre interlocuteur : il doit pouvoir être à l’écoute.
Le jour J : l’art de convaincre
Le jour J, gardez votre calme et prenez votre temps. Il est normal de demander une augmentation. Alors, lancez-vous !
LE DISCOURS DE MARIAGE
Le discours de mariage est un exercice particulier car il implique souvent des proches que vous connaissez parfaitement, ce qui ajoute du stress, de l’appréhension et des difficultés.
Choisir son style
Le discours de mariage doit être personnalisé et authentique. Vous devez trouver votre style. Choisirez-vous de rester classique, comme le sont les discours de transmission (parents), d’accompagnement (frères et soeurs), de souvenirs (amis), ou le discours de l’un des mariés envers l’autre? Certains préféreront la solennité du discours officiel du maire ou du représentant religieux. D’autres, encore, oseront le ton humoristique, comme certains membres de la famille ou encore des amis.
Préparez-vous
• Ne vous y prenez pas à la dernière minute.
• Votre discours doit vous ressembler. N’essayez pas d’imiter un style qui ne vous correspond pas. Utilisez des exemples, qui seront ici des anecdotes.
• Faites court, car les longs discours s’enchaînent parfois : prévoyez de parler entre deux et quatre minutes au maximum.
Soyez méthodique
Avant le jour J : si vous n’avez pas d’idée, commencez par faire une chronologie de votre rencontre avec les personnes pour lesquelles vous devez faire un discours, listez ses habitudes, les bons moments que vous avez passés ensemble, les anecdotes dont vous vous souvenez ; puis sélectionnez deux ou trois épisodes qui vous plaisent. Mettez toutes vos idées sur un brouillon et faites un plan. Enfin, répétez plusieurs fois votre discours devant d’autres proches de la personne et demandez des critiques.
Le jour J :
• N’essayez pas d’apprendre par coeur votre discours, mais plutôt d’avoir votre plan en tête. Ayez confiance en vous : vous connaissez tout ce que vous allez raconter, puisque vous l’avez vécu ! • Tenez-vous debout et droit devant l’assemblée, en particulier face à ceux à qui le discours est destiné. Regardez les personnes dans les yeux et n’oubliez pas le public.
• Utilisez le silence entre les petites anecdotes ou notes d’humour, votre auditoire rira ou sourira. Ne reprenez pas votre discours tant que les rires ou les applaudissements ne sont pas terminés. • Ayez en tête que le public (c’est-à-dire les invités, les amis, la famille) n’est pas contre vous. Au contraire, il est de votre côté et vous soutiendra pendant votre discours. • Vous avez le droit à l’erreur. Vous êtes là pour partager une émotion et vous avez le droit de buter, d’oublier un mot. C’est un moment émouvant pour tout le monde.
LA MÉDIATION
Un médiateur joue le rôle d’un diplomate qui résout les conflits dans la vie professionnelle ou personnelle. Se poser en intermédiaire pour désamorcer une situation difficile peut être utile à tous, à tout moment.
Identifiez celui ou ceux qui posent problème, ainsi que les points de tension
Interrogez le plus grand nombre de personnes liées au conflit ou qui en sont les témoins. Vous devez accumuler un maximum d’informations, isoler le problème et préparer la suite, en réfléchissant à des solutions acceptables par chacune des parties et trouver une sortie de crise équitable.
Abordez le problème directement
Expliquez d’une manière claire aux protagonistes qu’ils causent un problème au sein du groupe et que cela ne peut pas continuer ainsi.
Adoptez une posture neutre
Vous ne devez pas prendre position, sous peine de perdre votre crédibilité, de braquer vos interlocuteurs et de ne plus pouvoir intervenir.
Proposez du concret
Proposez des solutions concrètes. Demandez aux personnes concernées si elles sont d’accord avec votre proposition ; et si elles ne le sont pas, proposez-leur d’en discuter tous ensemble afin de légitimer votre solution.
Suivez de près la sortie de crise
Ce n’est pas parce que vous avez mis en place des mesures viables que le problème est réglé. Des rancoeurs peuvent subsister et certaines personnes peuvent avoir envie de se venger. Il faut donc être très vigilant : instaurez des mesures préventives pour favoriser la cohésion, comme l’organisation d’activités collectives pour souder à nouveau l’équipe
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Pour une augmentation de salaire, venez avec des arguments solides, mettez en avant vos actions au sein de l’entreprise.
Romain Decharne est professeur d’éloquence et président de la Fédération francophone de débat.