Poma transporte 6,5 millions de personnes… chaque heure.
depuis des décennies l’imposant ■ Mémorial du martyr au Jardin d’essai du Hamma. « Pour un Algérien, c’est naturel de prendre le téléphérique, c’est son quotidien!» s’amuse Wissam el-Moukahal, le patron de l’Etac, un joint-venture créé en 2014 entre l’Etat algérien et Poma pour implanter et exploiter les télécabines du pays.
Mais que vient faire Poma si loin des Alpes? Voilà bien longtemps que les stations de ski françaises ne sont plus le seul terrain de jeu de la société iséroise. « Plus de 80 % de notre chiffre d’affaires sont réalisés à l’export », observe Jean Souchal, le patron de Poma, entré dans la société il y a près de quarante ans. En Algérie, par le biais de l’Etac, Poma a depuis dix ans remporté quasi tous les appels d’offres pour implanter de nouvelles télécabines. L’Etac a notamment installé un téléphérique à Tizi Ouzou, en Kabylie, et rénove les cabines de l’équipement de Tlemcen, dans l’ouest du pays. Au total, elle a mis sur pied douze des quatorze remontées mécaniques que compte l’Algérie, grâce à quelque 800 salariés, dont une partie est logée tout près de l’aéroport d’Alger,
OEufs. Dans les années 1960, Poma produit les premières télécabines quadriplaces. dans un entassement de bâtiments en préfabriqué un peu miteux.
Encomparaison,letoutnouveau site industriel de Poma, à quelques kilomètres d’Albertville, fait figure de bâtiment ultramoderne. En doudoune et jean, Jean Souchal est plutôt fier de faire le tour du propriétaire, slalomant entre une télécabine de La Plagne en cours de réfection et les voitures d’un manège du Parc Astérix, Tonnerre de Zeus. Un an plus tôt, en janvier 2018, Jean Souchal accueillait une pléiade d’huiles pour inaugurer l’usine : le Premier ministre, Edouard Philippe, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, et la fine fleur des élus savoyards. Au plus haut sommet de l’Etat, on choie ce champion du monde du transport par câble – c’est l’appellation générique –, qui fait voyager sur terre et dans les airs plus de 6, 5 millions de personnes… chaque heure !
Poma, c’est d’abord Jean Pomagalski, arrivé de Pologne en 1907, à l’âge de 2 ans. L’ingénieur montera une petite affaire de travaux publics. Les sports d’hiver sont alors balbutiants. Ils prennent de l’essor à partir des années 1920, avec notamment les Jeux olympiques de Chamonix, en 1924. Un peu à l’image des garages qui ont vu naître les fleurons de la Silicon Valley, quelques inventeurs se creusent la tête dans leurs ateliers des vallées alpines pour trouver le moyen de gravir sans peine ces fichues pentes enneigées. A l’époque, le téléphérique est roi, mais les allers-retours des bennes font perdre un temps fou. En 1934, Jean Pomagalski installe à l’Alpe-d’Huez le premier remonte-pente, qui ne s’appelle pas encore tire-fesses. Le skieur peut enfin rejoindre le sommet des pistes sans déchausser. Quelques années plus tard, il met au point le système qui fera son succès: la perche du tire-fesses est reliée au câble par une pince qui s’accroche ou se décroche. Chacun peut donc l’attraper quand il veut. C’est, à plusieurs améliorations près, le principe qui est toujours en vigueur dans les stations de ski aujourd’hui.
La machine est lancée. Jean Pomagalski est un inventeur prolifique et ambitieux. Installée à Fontaine, dans la banlieue de Grenoble, la société Poma met au point, pêle-mêle, le premier télésiège dans les années 1950, puis les télésièges-cabines (une simple coque qui recouvre le télésiège), puis les premiers « oeufs », d’où naîtront les télécabines. En France, c’est Chamonix qui accueille la première télécabine, aux Bossons, en 1960. Mais c’est aux Etats-Unis que Poma a, un an plus tôt, installé le tout premier prototype de cette invention.
Eoliennes. Jean Pomagalski a tout de suite regardé au-delà des Alpes et des frontières. Le chef d’entreprise grenoblois met à profit l’importante diaspora polonaise pour s’implanter à l’étranger. En plus d’un prix au concours Lépine, il reçoit, en 1960, un oscar de l’exportation. Poma grandit en changeant de pays, mais surtout en se diversifiant. La neige devient un marché trop étroit. La ville est bien plus prometteuse. « Le transport par câble a plein d’avantages, explique Jean Souchal, qui a débuté chez Poma comme dessinateur
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