Vladislav Sourkov, le marionnettiste du Kremlin
Eminence grise. Ce maître ès intrigues, fidèle à Poutine, tire les ficelles en Russie, en Ukraine et ailleurs.
Lui qui d’habitude fuit les caméras, cette fois il ne résiste pas. Il vient d’entendre Vladimir Poutine achever son discours devant l’Assemblée fédérale et lancer un concours pour baptiser le dernier fusil semi-automatique de l’armée. Alors, il vibrionne à la sortie de l’enceinte, vêtu de sa veste en cuir. Il a une idée. C’est le premier à en avoir une. Il s’en délecte déjà. Il aperçoit un micro et se précipite. « Givi ! » lance-t-il. La journaliste n’est pas sûre de comprendre. « Givi ? – Oui, Givi, c’est le nom de guerre d’un colonel tombé en héros dans le Donbass [dans l’est de l’Ukraine, NDLR]. » Il sourit, prêt à partir puis, voyant l’air dubitatif de son interlocutrice, il revient, avance encore son menton pointu, agite la tête. « Givi pourrait convenir à n’importe laquelle de nos armes. »
Il n’est jamais bon de décevoir Vladislav Sourkov, 54 ans. Car c’est le marionnettiste le plus doué du Kremlin, un prince noir, le génie du mal, disent ses ennemis. Une figure qui a grandi dans l’ombre de Poutine avant de s’en éloigner puis de le rejoindre de nouveau, pour exercer son art : l’intrigue. Son terrain de jeu du moment ? L’Ukraine, déchirée par une guerre qui a fait plus de 10 000 morts. Depuis cinq ans, il occupe le poste de conseiller du président chargé du dossier. Là-bas, il orchestre le plus gros chambardement de l’espace postsoviétique : la scission d’un pays de 45 millions d’habitants dont les dirigeants ne cessent de réclamer le rattachement à l’Union européenne. Un conflit gelé comme la Russie sait les entretenir sur les marches de son empire pour mieux dissuader ses anciennes républiques de flirter avec l’Otan. « Le chaos en Ukraine, c’est lui », a récemment déclaré en privé la chancelière allemande, Angela Merkel. Lui s’en moque et prédit le pire pour l’Occident. « Les politiciens étrangers dénoncent l’ingérence de la Russie dans les élections et les référendums, écrit-il en février dans le quotidien Nezavissimaïa Gazeta, mais la situation est encore plus grave : la Russie s’introduit dans leurs cerveaux et ils ne savent que faire de leurs consciences altérées. »
« Poutine l’a choisi parce qu’il sait naviguer en eaux troubles », souligne l’une de ses vieilles connaissances, Guennadi Goudkov, ex-lieutenant colonel du FSB et longtemps l’un de ses opposants à la Douma.
« Le chaos en Ukraine, c’est lui ! » Angaela Merkel à propos de Sourkov
Sourkov, il est vrai, patauge dans le Donbass avec virtuosité. Règlements de comptes, contrebande, élections factices, le poumon industriel de l’Ukraine, désormais tenu par les républiques séparatistes de Donetsk et de Lougansk, n’obéit plus qu’aux oukases de Poutine et de son Talleyrand.
Un Talleyrand surgi de nulle part, car rien ne prédestine Sourkov à une telle ascension. Il naît en Tchétchénie et s’appelle en réalité Aslambek Doudaïev, patronyme de son père. Il a 5 ans lorsque celui-ci quitte la famille. Il part alors vivre dans la petite ville de Skopine, à 280 kilomètres de Moscou, avec sa mère, dont il prend le patronyme associé au prénom de Vladislav. L’adolescent « Slava » écoute Pink Floyd, Deep Purple, écrit des poèmes, lit les oeuvres complètes de Dostoïevski et porte des jeans violets. Il entre à l’Institut minier de Moscou, mais s’y ennuie très vite et interrompt ses études au bout de deux ans. Il opte pour l’armée et un service militaire en Hongrie dans les rangs des spetsnaz, les forces spéciales. A son retour, il fréquente une faculté de théâtre mais est renvoyé un an plus tard, après s’être battu avec un collègue antimilitariste.
Opportuniste éclairé. C’est alors qu’il croise le chemin de son premier ange gardien : Mikhaïl Khodorkovski, le futur magnat du pétrole qui séjournera dix ans en prison sur ordre de Poutine. La folie de l’ère Ieltsine secoue le pays avec ses privatisations en cascade et ses fortunes vite bâties. Sourkov, 23 ans, pratique les arts martiaux. Khodorkovski, 24 ans, actionnaire de la banque Menatep et bientôt du géant pétrolier Ioukos, cherche des gardes du corps. Le premier entre au service du second. Son boulot? Jouer les sentinelles devant ses bureaux de change.
Sauf que Slava révèle rapidement un autre talent : sa créativité. Il suggère à son employeur le lancement de campagnes de publicité. « Il a été le premier à imaginer des annonces en rupture avec nos pratiques soviétiques », se souvient Konstantin Kostine, salarié à l’époque au service marketing de la compagnie. Il invente un slogan, placardé sur les bus et dans les rues de la capitale : « On finance tout pour améliorer le monde ». Sourkov parvient même à déloger le logo de l’italien Olivetti de l’horloge du journal du soir de la première chaîne pour imposer celui de la banque. Un coup qui bluffe Khodorkovski. « J’ai compris l’étendue de son talent », dira-t-il. « Il ne se contentait pas de proposer une idée, il la mettait à exécution avec une énergie impressionnante », poursuit Kostine. Sourkov inaugure aussi un métier plus opaque : porteur d’enveloppes. « Il m’a demandé combien je voulais pour rejoindre le parti présidentiel . J’étais estomaqué », raconte Vladimir Rijkov, alors vice-président de la Douma, qui a refusé cette offre.
En dix ans, Sourkov gravit les échelons et rejoint l’état-major de Menatep. Mais il a de l’appétit. Il réclame une part du capital. Khodorkovski et ses associés refusent. Il quitte le groupe pour Alfa Bank, un autre établissement financier, avant de rejoindre ORT, la première chaîne de télévision, au poste de directeur des relations publiques. Une fonction qui lui permet de rencontrer son deuxième ange gardien, Alexandre Volochine, chef de l’administration présidentielle de Boris Ieltsine. En août 1999, il devient son adjoint. Mais Sourkov observe un autre homme qui monte, un inconnu prêt à participer à sa première élection présidentielle pour succéder à Ieltsine, Poutine, dont il rejoint l’équipe de campagne. Le soir de la victoire, il est là, parmi les camarades de Saint-Pétersbourg de l’ex-officier
L’ado « Slava » écoute Pink Floyd, Deep Purple, écrit des poèmes, lit les oeuvres complètes de Dostoïevski et porte des jeans violets.
du KGB. Il sourit, silencieux, les bras croisés sur son pull tandis que les autres entourent le chef. Il n’a même pas de verre de vin à la main lorsque tous portent un toast au nouveau tsar. « Poutine se méfiait de lui en raison de ses liens avec Khodorkovski, mais il l’a gardé car il avait besoin de gens efficaces», explique Alexeï Moukhine, un ancien du Kremlin. «Construis un Etat sans envoyer les gens en prison », lui glisse néanmoins son mentor Volochine.
Sourkov s’y emploie avec zèle au poste de chef adjoint de l’administration présidentielle, en oubliant toutefois la seconde partie du conseil. « Il ne parlait jamais, je me suis dit que c’était un pitbull capable d’arracher le cou de ses adversaires », se souvient Mikhaïl Kojoukhov, un ex-porte-parole de Poutine. Un pitbull qui se tait lors de l’arrestation de son ex-patron Khodorkovski. L’ancien de Menatep, Konstantin Kostine, devenu le bras droit de Sourkov au Kremlin, témoigne même contre l’homme d’affaires. L’éminence grise du Kremlin se contente d’un geste: rendre régulièrement visite à la famille du prisonnier.
« Démocratie souveraine ». En attendant, le « brillant tacticien », comme le qualifient les télégrammes diplomatiques de l’ambassade américaine, engrange les résultats. « Il a créé le système politique actuel, qu’on soit d’accord ou non avec lui », souligne Leonid Gozman, ancien président du mouvement Juste Cause. Sourkov défend aussi une nouvelle doctrine, la « démocratie souveraine ». Un modèle fondé sur le verrouillage du parti présidentiel Russie unie et l’instauration d’un multipartisme de façade. « On ne peut pas jouer avec un pion unique, même si c’est le roi », dit-il.
Mais gare à ceux qui s’émancipent. «Vous me devez tous votre place, alors, vous allez voter comme c’est écrit », lance-t-il en 2003 à des députés de Rodina, un nouveau groupe parlementaire. Son leader, Dmitri Rogozine, a même droit à un traitement spécial : le fils de l’un de ses collaborateurs est kidnappé et un de ses partisans reçoit de l’acide au visage. « Deux hommes m’ont donné rendezvous dans un hôtel et m’ont demandé de démissionner », raconte-t-il à l’époque au Point. Pour son acte d’obéissance, le déchu se verra cependant récompensé d’un poste d’ambassadeur auprès de l’Otan.
En septembre 2011, à la veille des élections législatives, l’oligarque Mikhaïl Prokhorov subit le même sort. L’homme, pourtant placé par Sourkov à la tête du parti libéral Juste Cause, présente l’inconvénient de siphonner trop de voix au camp de Poutine. Les sbires de Sourkov le démettent lors d’un congrès houleux. « Je ferai tout pour que ce marionnettiste dégage un jour », enrage le milliardaire. Voeu pieux.
Il y a aussi ceux qui tentent de résister. C’est le cas d’Ilia Ponomarev, l’un des rares députés de l’opposition. « Lorsque je suis entré dans son bureau, il m’a dit: “Est-ce qu’on peut imaginer un projet avec lequel je pourrais vous rémunérer ?” se souvient-il. Je lui ai répondu que je ne traite pas avec le diable et ça l’a fait rire. » Pourtant, deux ans plus tard, Sourkov touche au but et lui verse 750 000 dollars pour participer au développement du
parc technologique Skolkovo. « Je lui ai dit d’accord à condition de ne pas mélanger les genres », se défend Ponomarev. « On les tenait tous, raconte Andreï Koliadine, l’un des anciens collaborateurs de Sourkov. Et tous connaissaient les limites à ne pas franchir. » Y compris Alexeï Navalny, l’opposant le plus coriace. « Il recevait des banques russes et étrangères 300 000 dollars par mois. »
Rien n’arrête Sourkov. « Si vous lui disiez “c’est impossible”, il vous répondait : “Tu as essayé ?” Et, dans le cas contraire, c’était la porte », poursuit Koliadine. Une éviction accompagnée d’une petite phrase : «Il n’y a rien de personnel.» Celle dont use aussi Poutine. De quoi électriser l’ambiance au bureau. « Entrer en réunion, c’était comme aller chez le dentiste. A la moindre erreur de vocabulaire dans un texte, il sautait sur sa chaise et hurlait en disant qu’il s’agissait du destin du pays. Quand j’en sortais, je me rendais à l’église pour évacuer tout ça », conclut Koliadine.
Education patriotique. II n’empêche, les idées fusent. Au lendemain de la révolution orange en Ukraine, il parvient à vendre à Poutine le projet d’un mouvement de jeunes capable de défendre le régime face aux « complots de l’Occident ». Nachi (« Les nôtres ») voit le jour : une organisation de 120 000 membres avec ses camps d’été et ses méthodes brutales. Alexeï Venediktov, directeur de la radio indépendante Echo de Moscou, garde en mémoire leur visite dans son immeuble un jour de 2007. « Ils sont venus filmer mes voisins en leur demandant si je trompais ma femme ou battais mes enfants. » Une hache et un billot sont même déposés devant sa porte. « J’ai appelé Sourkov et je lui ai dit : “Moi aussi, je connais ton adresse !” Il m’a répondu : “C’est pas moi.” J’ai insisté : “Je connais ton adresse !” » Qu’importe, Sourkov est fier de sa créature. « Vous êtes la future élite du pays », lance-t-il au congrès du mouvement Nachi.
Tout lui réussit. Avec sa femme, Natalia Doubovitskaïa, ancienne secrétaire rencontrée à Menatep, il mène grand train. Tous deux occupent avec leurs trois enfants deux demeures de 600 et 700 mètres carrés au bord d’un lac de 4 hectares, à 12 kilomètres de Moscou. Une fois par an, Natalia et ses copines partent en hélicoptère dans la région de Tver pour une cueillette aux champignons. Les mêmes s’envolent en jet privé à Dubai pour y loger dans un hôtel à 3 500 dollars la nuit. Elles organisent aussi de fastueuses soirées, déguisées en Marie-Antoinette ou Catherine II.
Sourkov se sent pousser des ailes lorsqu’en mai 2008 Poutine cède son fauteuil présidentiel à l’un de ses fidèles, Dmitri Medvedev. Ce dernier, ex-professeur de droit, incarne l’ouverture. Sourkov, maintenu à son poste, décide de jouer la carte du renouveau. Des portraits de Che Guevara, de Barack Obama et du rappeur américain Tupac Shakur ornent son bureau. « Avec Medvedev, ils ne se quittaient plus, ils blaguaient ensemble, échangeaient sans cesse des notes», raconte l’expert Andreï Kolesnikov, du centre Carnegie. Pour son nouveau boss, Sourkov crée même à Iaroslav un club de réflexion concurrent de celui de Valdaï, cher à Poutine.
C’est aussi l’heure où il joue les artistes. « Il regrettait de ne pas l’être devenu, alors il cherchait toujours notre compagnie », explique Marat Guelman, ancien directeur du musée d’Art contemporain de Perm. Il écrit ainsi les paroles de chansons du groupe de rock russe Agata Kristi. Puis il fait monter une pièce tirée de l’une de ses nouvelles intitulée « Proche de zéro ». Une histoire signée sous pseudonyme dans laquelle il fustige les moeurs corrompues de l’élite politique. Il confie la mise en scène au réputé Kirill Serebrennikov, aujourd’hui poursuivi en justice. Le jour de la première, le 15 janvier 2011, le Tout-Moscou se presse au Théâtrestudio d’Oleg Tabakov. « Je les voyais avec leurs boutons de manchette et
leur teint bronzé », raconte l’acteur principal, Anatoli Bely. Il y a eu des rires nerveux pendant toute la représentation. » Sourkov est parmi eux et jubile. « A la fin, il est venu me voir dans ma loge et je l’ai vu avec son regard noir, démoniaque. J’en tremblais. Il m’a dit: “Merci d’avoir été aussi honnête.” » Anatoli Bely éclate de rire : « C’était d’un tel cynisme ! On ne pourrait jamais rejouer une telle pièce de nos jours. »
Trahison et rédemption. De fait, le vent tourne. L’échéance présidentielle approche et Medvedev laisse entendre qu’il pourrait briguer un second mandat. Sourkov le soutient discrètement. « Il pensait que Medvedev permettrait d’éviter la colère de la rue », souligne l’ex-député Ilia Ponomarev. En face, Poutine, cantonné au poste de Premier ministre, sent monter la trahison. Il organise la riposte en créant le Front populaire panrusse, mouvement destiné à soutenir sa candidature le moment venu. Dans l’équipe de Sourkov, la panique gagne. « Les gouverneurs n’arrêtaient pas de nous appeler pour savoir pour quel parti coller les affiches », se rappelle l’un des ex-adjoints, Andreï Koliadine. Huit membres de son département démissionnent. « C’est votre droit », leur dit Sourkov.
Puis survient l’impensable : Medvedev et Poutine annoncent qu’ils échangent leurs postes. L’ex-agent du KGB redeviendra président. La grogne s’installe, amplifiée par les fraudes aux élections législatives. Des dizaines de milliers de personnes descendent dans la rue. Pour l’entourage de Poutine, le responsable du désordre a un nom : Sourkov. « Il a financé les manifestants », murmure à l’oreille de Poutine Viatcheslav Volodine, le futur homme fort de l’administration présidentielle. « L’enquête sur ce prétendu complot a duré des années », soupire Gleb Pavlovsky, alors conseiller auprès de Medvedev et lui-même chassé du Kremlin.
Pour Sourkov, c’est le début du chemin de croix. Poutine lui offre un cadeau empoisonné : le portefeuille de vice-Premier ministre chargé des affaires gouvernementales. « Le pire boulot de bureaucrate qui existe, le contraire de sa nature, explique un proche. Il a souffert du matin au soir. » Pour ne rien arranger, la justice s’intéresse à son cas. « Des hommes m’ont rendu visite pour me faire signer un document contre Sourkov, raconte l’ex-député Ilia Ponomarev. Ils me disaient : “Cétait votre ennemi politique, vous pouvez l’envoyer en prison.” J’ai refusé et j’ai même écrit à Poutine pour le défendre. »
L’homme qui en savait trop. Sourkov, lui, tente de sauver sa peau. « Si quelqu’un est coupable, qu’on nous montre les preuves », s’emporte-t-il à Londres devant des étudiants de la London School of Economics. Sa pique en territoire étranger ulcère Poutine, qui cesse de le recevoir. Le coup de grâce a lieu le 7 mai 2013. Lors d’une réunion publique, le chef du Kremlin le somme de s’expliquer sur des décrets inappliqués. Il démissionne le lendemain.
Cinq mois s’écoulent. Et le voilà qui resurgit. « Poutine ne pouvait pas le laisser partir, dit le politologue Alexeï Moukhine, il sait trop de choses. » Cette fois, plus question de politique intérieure. Sa nouvelle jungle s’appelle l’Ukraine. Une deuxième révolution s’y profile et Moscou n’entend pas laisser le champ libre à Washington et Bruxelles. Sa mission ? Maintenir à tout prix le prorusse Viktor Ianoukovitch au pouvoir. Il se rend donc à Kiev en février 2014 et prend ses quartiers au palais présidentiel. « Tout est sous contrôle », ne cesse de lui dire Ianoukovitch, tandis que près de 500 000 manifestants se massent sur la place centrale. Puis surviennent les massacres du 20 février (82 morts) et la fuite du président. « Je n’aurais jamais imaginé que cette merde était aussi lâche », enrage Poutine lorsqu’il apprend son départ. Pour Sourkov, c’est un échec. Quel a été son rôle ? «Il a coordonné le groupe de snipers venu de l’ étranger », accuser a le futur Petro Porochenko.
Pied de nez. Sourkov se voit déjà au chômage. Mais Poutine ne bronche pas. L’annexion de la Crimée le mois suivant et l’apparition de son nom sur la liste des sanctions le remettent même en selle. « C’est comme être sélectionné pour les oscars de la politique », fanfaronne Sourkov. Deux jours avant la publication de la liste et en guise de pied de nez, il s’offre même une escapade à Stockholm avec sa femme. A son retour, il monte une autre cabale: la déstabilisation de l’est de l’Ukraine. Le Donbass s’embrase et les troupes des séparatistes, appuyées par les forces russes, avancent. Le manipulateur du Kremlin se charge alors de fabriquer une illusion : celle d’une insurrection menée par des locaux. Il chasse les hommes de Moscou et nomme Alexandre Zakhartchenko, ex-mineur électricien du coin, à la tête de la République populaire de Donetsk. Il organise un référendum d’autodétermination puis négocie les accords de Minsk avec l’Ukraine, la France et l’Allemagne. Un résultat que savoure Poutine pour une raison simple : « L’accord donne lieu à toutes les interprétations et demeure inapplicable », souligne le directeur de la radio Echo de Moscou, Alexeï Venediktov.
En mai, Sourkov remporte même une autre victoire : la délivrance de passeports russes aux habitants du Donbass. Une mesure pourtant combattue par les libéraux du gouvernement, effrayés à la perspective de nouvelles sanctions. Le camp des séparatistes exulte. « On attendait ça depuis cinq ans, se félicite Alexandre Borodaï, ex-Premier ministre de la République populaire de Donetsk. Sourkov est unique ! » ■
« Sourkov a coordonné le groupe de snipers venu de l’étranger. » L’ancien président d’Ukraine Petro Porochenko