Dans les pas d’Abraham
Entre récits bibliques et actualité géopolitique, un itinéraire unique au coeur de l’Histoire.
La Terre sainte est un vieux pays de randonnée. Jérusalem et ses ruelles millénaires semblent l’endroit rêvé pour une petite mise en jambe. Sauf que, gavé d’Evangiles et d’épisodes bibliques par des guides impitoyables, étourdi par l’intarissable flot de pèlerins et de touristes à smartphone, on se retrouve titubant sur la Via Dolorosa, à peine plus frais qu’un Christ en route pour le Golgotha. Nul doute qu’aujourd’hui il y aurait un peu plus de monde pour l’aider à porter sa croix. La foi sincère a bien du mal à se dépêtrer des marchands du Temple. Alors, le soir même, on retrouve avec soulagement la quiétude de la vallée du Jourdain et ses âpres collines mouchetées de vert par les champs irrigués.
Selon la Genèse, Abraham, « père des croyants », reconnu tant par les chrétiens et les juifs que par les musulmans, avait quitté sur ordre de Dieu sa Mésopotamie natale pour rejoindre le pays de Canaan, la Terre promise. En 2004, l’université Harvard eut l’idée de créer un itinéraire sur les traces du patriarche afin d’amorcer un tourisme durable et engagé auprès des populations locales et de leur apporter des revenus par le biais des guides, des hébergements et de la restauration. Pour l’heure, 330 kilomètres entre Rummana, au nord, et Hébron, au sud, ont été finalisés en Cisjordanie. Abraham serait mort à 177 ans. Peut-on trouver plus belle illustration des vertus de la marche à pied? Au nord-est de Jérusalem, le camp de réfugiés d’Aqbat Jaber est l’endroit parfait pour aborder le sentier et le contexte géopolitique. Les femmes de l’association qui gère la maison d’hôtes locale ont tôt fait de raconter l’exil, les terres confisquées en 1948, les familles déchirées, les vies précaires à l’ombre de l’Onu et surtout l’espoir – cet increvable espoir, que le temps et les aléas n’ont jamais entamé – de retrouver un jour le pays perdu.
A la sortie du camp, l’itinéraire passe devant une clé monumentale, qui clame le mantra de 5 millions de réfugiés palestiniens : « We will return » (« Nous reviendrons »). Passé le wadi El-Qilt, les hommes, leurs peines et leurs querelles
■