Retraites, arrêtons de nous tortiller
L’urgence n’est pas à l’universalité des retraites, mais à leur pérennité.
Dans « Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte », Marx soutient que « l’histoire se répète deux fois : la première fois comme une tragédie ; la seconde fois comme une farce ». La formule s’applique parfaitement à la France, qui ne cesse de mimer sa propre histoire, produisant des répliques toujours plus dégradées du séisme de 1789.
En 1995, le blocage du pays à la suite de la grève des cheminots contre la réforme de leur régime spécial de retraite provoqua l’abandon du plan Juppé sur les retraites et sur la modernisation de la Sécurité sociale, puis la fin prématurée du septennat de Jacques Chirac avec l’échec de la dissolution de 1997. Aujourd’hui, le mouvement reconductible lancé ce 5 décembre à la SNCF et à la RATP cherche à ressusciter la grève par procuration de 1995 et la convergence des luttes de Mai 68. Avec pour objectif de transformer la réforme des retraites en retrait des réformes et d’achever le travail des gilets jaunes en enterrant définitivement le quinquennat d’Emmanuel Macron.
La réforme des retraites reste indispensable. Le système est en effet insoutenable. Il conjugue un déséquilibre démographique (2 retraités pour 10 actifs en 1980, 3 pour 10 aujourd’hui, 6 pour 10 en 2060), un déficit financier structurel, qui atteindra 1 % du PIB dès 2025, et des inégalités criantes entre les 42 régimes du fait des avantages dans la fonction publique et les régimes spéciaux. Sans rééquilibrage des retraites, qui mobilisent 14 % du PIB, il est impossible de reprendre le contrôle des finances publiques au moment où la dette s’apprête à dépasser 100 % du PIB.
La grève du 5 décembre souligne d’abord la gestion calamiteuse des entreprises publiques par l’Etat. Elles cumulent en effet l’effondrement de la qualité des services rendus à la population, la sous-rentabilité et le surendettement, la sanctuarisation du corporatisme au détriment de l’intérêt général. Les régimes spéciaux, qui sont financés grâce à l’abondement des contribuables à hauteur de 5,5 milliards d’euros chaque année et qui permettent, comme vient de l’établir la Cour des comptes, aux agents de la RATP de cesser leur activité à 55 ou 56 ans avec une pension mensuelle moyenne de 3 705 euros correspondant à 88 % de leur rémunération, le tout aux frais de la nation, en sont le symbole.
La responsabilité du nouveau psychodrame social autour des retraites incombe cependant moins aux manifestants ou aux syndicats qu’à Emmanuel Macron et à son gouvernement. De consultations en grand débat, de reports en concertations, ils ont
Les agents de la RATP cessent leur activité à 55 ou 56 ans avec une pension moyenne de 3 705 euros, aux frais de la nation.