Afrique, le tabou de la natalité
Selon la Banque mondiale, seule la baisse de la démographie permettrait de relancer l’économie et de réduire la misère sur le continent.
Aune époque pas si lointaine, la gauche française pouvait se prévaloir de défendre, au moins en paroles, des causes humanistes à dimension universelle. Les militants altermondialistes d’Attac se battaient pour l’annulation de la dette des pays pauvres dans l’espoir qu’ainsi allégés de ce fardeau financier ils puissent enfin décoller économiquement. De nos jours, ils participent activement aux manifestations de gilets jaunes plus préoccupés par les inégalités en France qu’entre pays du Nord et pays du Sud, plus soucieux de la hausse de leur pouvoir d’achat que de la misère dans le reste du monde.
Les mêmes qui faisaient hier un impératif moral de l’aide aux pays en développement s’inquiètent aujourd’hui de leur forte croissance qui pollue la planète et menace l’avenir de nos modes de vie, avec des canicules gâchant nos vacances d’été et un manque de neige compromettant la pratique du ski hors piste. L’altruisme a cédé la place au repli sur soi et à l’égoïsme. Obsédée par un futur angoissant, la grande cause du réchauffement climatique a une fâcheuse tendance à faire oublier les difficultés du présent, à reléguer au second plan de nos préoccupations d’Occidentaux nantis les grands fléaux économiques qui sévissent actuellement sur Terre, à commencer par celui de l’extrême pauvreté.
Dans un rapport récemment publié, la Banque mondiale rappelle comment celle-ci a, en un quart de siècle, massivement migré de l’Asie vers l’Afrique. Alors qu’en 1990 80 % des habitants de la planète vivant avec moins de 1,90 dollar par jour étaient originaires d’Asie et 15 % d’Afrique, cette dernière en concentrait 57 % en 2015 et l’Asie 35 %. Le continent africain est bien parti pour détenir bientôt le monopole de la misère. La part de la population dans l’extrême pauvreté y a pourtant beaucoup diminué, chutant de 54 % en 1990 à 41 % en 2015. Mais le nombre de pauvres, lui, y a fortement augmenté au cours de la même période, passant de 278 millions à 413 millions, et ce en raison de la forte croissance démographique (+2,7 % en moyenne annuelle).
On se souvient qu’en juillet 2017, lors d’une conférence de presse en marge d’un G20, Emmanuel Macron avait fait scandale en déclarant au sujet de l’aide financière à l’Afrique : « Quand des pays ont encore sept ou huit enfants par femme, vous pouvez décider d’y dépenser des milliards d’euros, vous ne stabiliserez rien. » N’en déplaise aux belles âmes de gauche – pardon pour le pléonasme –, qui avaient dénoncé des propos néocolonialistes insultants et nauséabonds, il se trouve que les meilleurs spécialistes de l’économie africaine à la Banque mondiale partagent l’opinion du chef de l’Etat, même s’ils l’expriment de façon plus diplomatique : «La réduction de la fécondité doit indubitablement être considérée comme une priorité absolue si l’on veut accélérer à la fois la croissance économique et la réduction de la pauvreté. »
En cinquante ans, le taux de fécondité en Afrique a certes baissé, de 6,7 à 4,8 enfants par femme, mais à un rythme bien moindre qu’en Asie de l’Est, par exemple, où il est passé de 5,7 à 1,8 au cours de la même période. Plus de 50 % de la population africaine vit aujourd’hui dans des pays où les femmes ont
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Le continent africain est bien parti pour détenir bientôt le monopole de la misère.