Le Point

Repas d’affaires : cinquante minutes, thé vert compris !

- PAR NICOLAS BASTUCK ET THIBAUT DANANCHER

«On prendra le grand menu. En attendant, dites au chef de nous préparer quelques spécialité­s. Et puis du champagne ; on verra tout à l’heure pour les vins… » C’est un temps que les moins de 40 ans ne peuvent pas connaître. Quand les déjeuners d’affaires duraient des heures, suivant le précepte de Paul Bocuse: « Autour d’une bonne table, le temps ne compte plus ! » « Le repas se terminait autour d’un roboratif plateau de fromages et d’un chariot de desserts à plusieurs étages. Ensuite, on passait au salon où les clients sirotaient quelques liqueurs en fumant un gros cigare», s’amuse le chef Jean-François Piège, propriétai­re de plusieurs restaurant­s, à Paris.

« Pour les patrons, le restaurant faisait office de deuxième bureau », confirme Mathieu Pacaud, propriétai­re de l’Apicius, derrière les Champs-Elysées. « Les deals se faisaient à table, ça empestait le havane et ça n’en finissait pas », raconte, ému, le fils de Bernard Pacaud, chef de l’Ambroisie, place des Vosges, l’un des derniers « trois étoiles » à résister à la formule du déjeuner d’affaires. «Je ne sais pas comment ils faisaient pour repartir. D’ailleurs, beaucoup restaient dîner sur place », sourit Laurent Audiot, ancien associé de Gérard Depardieu à La Fontaine Gaillon, désormais aux fourneaux du très sage Marius et Janette, restaurant de poisson du Triangle d’or parisien. « Quand on rentrait de la coupure [la pause du personnel entre deux services], les clients du midi, encore attablés, croisaient ceux du soir », évoque, nostalgiqu­e, Christian Sochon, directeur du Laurent où il officie depuis trente-deux ans.

Ce temps là est révolu. Aujourd’hui, ce serait plutôt cinquante minutes, thé vert compris !

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