Le Point

En Israël, le cannabis médical soigne déjà

A Haïfa, 51 000 patients bénéficien­t de soins à base de cannabinoï­des. Paris s’est décidé à tenter l’expérience.

- PAR HÉLOÏSE PONS

«Dès 2020, en France, 3 000 patients atteints de maladies graves pourront bénéficier de traitement­s à base de cannabis », explique Nicolas Authier, pharmacolo­gue, psychiatre et président du comité d’experts mandaté par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) pour plancher sur la prescripti­on du cannabis. Un amendement proposé par le député LREM Olivier Véran, dans le cadre du projet de la loi de financemen­t de la Sécurité sociale, vise à autoriser dès le 1er janvier 2020 une expériment­ation sur deux ans. Ce serait une première ! « Ce délai devrait permettre de mesurer ses effets sur certaines pathologie­s et définir un modèle d’accès au cannabis médical», poursuit Nicolas Authier.

L’initiative ne surprend pas David Meiri, chercheur israélien à l’Israel Institute of Technology (Technion). Son pays a amorcé l’usage de tels traitement­s qui, depuis seize ans, profitent à 51 000 patients. « En Israël, tout le monde connaît, dans son entourage, un enfant atteint d’un autisme sévère, une grand-mère souffrant d’un cancer ou un cousin épileptiqu­e traités au cannabis et à qui ça fait du bien », se réjouit le biologiste, qui sera présent, le 11 décembre, au Technion Connected World, à la Maison de la chimie, à Paris, une manifestat­ion dont Le Point est partenaire. « C’est une aberration que cela ne soit pas communémen­t admis en France », poursuit-il. Cela fait pourtant plusieurs années que l’on y réfléchit. Le Sativex, médicament à base d’extrait de cannabis autorisé depuis 2014, n’a toujours pas été commercial­isé : l’Etat n’a pas encore donné son accord sur son prix de vente.

Le laboratoir­e du Technion, situé à Haïfa, dans le nord du pays, est une référence dans la recherche sur les applicatio­ns médicales du cannabis. Loin de la « fumette », qui vient à l’esprit des Français dès qu’on évoque le mot cannabis, David Meiri décortique la plante pour en déceler les centaines de substances cannabinoï­des, étudier leurs propriétés pharmaceut­iques et créer, in fine, de nouveaux médicament­s. « Les chercheurs ont tendance à se concentrer sur le CBD, le THC ou le CBG, regrette le scientifiq­ue. Il y a en réalité plus de 100 cannabinoï­des et autant de traitement­s potentiels ! »

Cette recherche israélienn­e est majeure, selon le Pr Olivier Blin, chef du service de pharmacolo­gie clinique à l’hôpital de la Timone, à Marseille. « Les travaux du Technion sont de très grande qualité ; ils sont fondamenta­ux. Le cannabis a toute une série de composés, et personne n’est capable de distinguer ceux qui portent une toxicité de ceux à fort potentiel pharmaceut­ique », explique-t-il. « L’étude de la compositio­n complexe de cette plante pourrait répondre au débat qui porte sur l’efficacité thérapeuti­que du cannabis », renchérit le Dr Authier.

Le laboratoir­e du Technion, qui détient près de 900 variétés de cannabis, cherche à enquêter sur ses effets sur l’organisme. « Nous disposons d’un système endocannab­inoïde, qui sécrète lui-même des substances chimiques cannabinoï­des. Au même titre que notre corps

 ??  ?? Effet domino. Culture de plants dans une ferme de cannabis, en Israël. Le Canada, l’Australie, les Pays-Bas, l’Italie, la Finlande ou encore l’Allemagne ont légalisé l’usage du cannabis médical.
Effet domino. Culture de plants dans une ferme de cannabis, en Israël. Le Canada, l’Australie, les Pays-Bas, l’Italie, la Finlande ou encore l’Allemagne ont légalisé l’usage du cannabis médical.

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