Eux, ils n’ont pas renoncé à leur retraite chapeau
produits plus chers mais supposés répondre à l’appétit des consommateurs pour une alimentation plus saine. Danone s’est mis aussi à communiquer sur des marques, à miser sur la constitution de «tribus de consommateurs » pour certains yaourts (Les 2 Vaches, par exemple) ou encore pour Blédina… Dans le domaine de l’eau, Evian tente de séduire avec des eaux aromatisées. Aux Etats-Unis, le premier marché de Danone, l’entreprise française a cassé sa tirelire en 2017 afin de s’offrir pour 12,5 milliards de dollars l’entreprise locale WhiteWave, spécialisée dans les produits bio et d’origine végétale. Objectif : diminuer sa dépendance au lait animal et parier sur le frémissant marché du lait végétal – à base de soja, d’avoine ou de riz. « Ce qui paraissait évident dans l’alimentation il y a seulement dix ans ne l’est plus du tout aujourd’hui, explique Faber. Il y a vraiment un risque d’être complètement déstabilisés. Mais il y a plein d’autres chantiers : les transformations internes, la numérisation de l’entreprise, la pyramide des âges dans l’entreprise. » En parallèle, Danone a décidé de réduire ses coûts pour améliorer sa marge opérationnelle.
Stalactites. Cette stratégie de Danone semblait porter ses fruits jusqu’à l’annonce des résultats du troisième trimestre 2019. Un peu décevants. Les marchés se mettent à douter et s’interrogent sur la capacité de Danone à atteindre les objectifs fixés pour 2020, dont une croissance organique de 4 à 5 %. La Bourse et Danone, c’est je t’aime moi non plus. On estime que l’entreprise subit une décote de 20 % par rapport à des sociétés comparables, alors que le potentiel de croissance est a priori plus élevé. La faute, aussi, aux règles internes de Danone, qui limitent le droit de vote des actionnaires. Et à la bienveillance des pouvoirs publics, jamais en reste pour protéger ce champion hexagonal de l’agroalimentaire. On a vu ainsi la Caisse des dépôts monter au capital, à la suite de l’entrée au capital de Corvex en 2017, un fonds activiste américain, avec la bénédiction du ministre de l’Economie, Bruno Le Maire.
Avant notre entrevue avec Emmanuel Faber, on nous avait prodigué de nombreux conseils sur la manière d’interviewer le PDG de Danone. Dont celui-ci, le plus amusant : « N’oubliez pas votre doudoune pour le rendez-vous. » Mais nous n’avons pas grelotté, finalement, dans son bureau situé au troisième étage du QG de Danone, à côté de l’Opéra de Paris. En fait, c’était une blague d’un de ses proches sur le mode « quand Emmanuel est quelque part, des stalactites commencent à se constituer au plafond ». L’homme est réputé glacial,
« Faber peut apparaître donneur de leçons, mais on a besoin d’électrons libres dans tous les milieux. »