Le Point

RETROUVER CAMUS

- FRANÇOIS-GUILLAUME LORRAIN

Documentai­re. Voir la photo où Camus, au lendemain de son prix Nobel reçu à Stockholm en décembre 1957, se fait agresser verbalemen­t par un étudiant kabyle sur la guerre d’Algérie. C’est ce jour-là qu’il répondit, évoquant les attentats aveugles qui pouvaient viser sa mère retournée vivre à Alger : « Si c’est cela la justice, je préfère ma mère. » Apprendre, l’instant suivant, de sa fille, Catherine Camus, que l’étudiant kabyle était venu bien plus tard se recueillir sur la tombe de Camus, à Lourmarin, pour lui demander pardon. Au XXe siècle, il n’y eut pas d’écrivain français plus charismati­que, plus incarné, plus sensuel. Aussi, comment se refuser le plaisir de ce documentai­re qui donne à (re)voir la courte vie haletante d’un fils, orphelin de père et dont la mère était illettrée, qui a grandi dans le quartier de Belcourt à Alger, tuberculeu­x, admis au coeur de la maison Gallimard, avant d’être la voix, dans Combat, de la nouvelle France issue de la Résistance, rêvant d’un monde égalitaire, antitotali­taire, européen, puis d’avoir raison face à Sartre ? Mille vies de Camus, intellectu­elle, théâtrale, fraternell­e, amoureuse, avec ses aléas, ses allers-retours entre la France et l’Algérie, avec aussi de nombreux témoignage­s, dont ceux de sa fille, toujours très justes, de son dernier amour, la Franco-Danoise Mette Ivers, ou de Michel Bouquet, le jeune frère en théâtre, qui se souvient avoir pensé après sa mort : « Comment ne sera-t-il plus là dans ce qui va m’arriver maintenant ? » Une question que nous pourrions faire nôtre, aujourd’hui

Les Vies d’Albert Camus, de Georges-Marc Benamou (France 3, mercredi 22 janvier, 21h05).

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Albert Camus et son épouse, Francine.

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