Mishima psychédélique
Roman. « Ne peut-on voir dans cette oeuvre un “roman d’aventures psychédélique” », écrit Yukio Mishima de Vie à vendre, paru en feuilleton au Japon en 1968 dans Playboy Hebdo, inédit publié aujourd’hui par Gallimard. Soit ! À condition d’y voir un délirant mélange de genres littéraires et d’obsessions de l’auteur : il y a du polar, du manga, du roman d’espionnage dans les aventures du narrateur, un jeune rédacteur publicitaire qui vient de rater son suicide et fait paraître l’annonce suivante : « Je propose une vie à vendre. À utiliser à votre guise. » S’ensuit une abracadabrante série de rôles à tenir, pour le compte d’un vieil homme jaloux de sa jeune femme, d’une bibliothécaire peu honnête, du fils d’une femme vampire… Ces nouvelles vies étant fort rémunératrices, Hanio se retrouve, à 27 ans, à la tête d’une belle rente. À vie ? C’est sans compter sur la menaçante société secrète ACS, l’Asia Confidential Service, et ses sbires… Tant de loufoquerie ne masque pas le fond du problème. « En publiant son annonce “Vie à vendre”, il avait déjà choisi son destin : se faire tuer de façon absurde, alors maintenant, il n’avait qu’à en prendre son parti.» Bien des phrases résonnent ainsi, écrites deux ans avant que l’auteur de Confession d’un masque se fasse sepukku, le 25 novembre 1970. « De même qu’une boîte aux lettres rouge se coiffe, un jour de neige, d’une capeline de flocons, la mort, dès cet instant, lui alla comme un gant. »
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Vie à vendre, de Yukio Mishima. Traduit du japonais par D. Palmé (Gallimard, 272 p., 22 €).