Beauté : les savons signature
Plus qu’un accessoire d’hygiène, le savon solide s’affirme comme un marqueur d’identité.
Seuls 37% des Français se lavent les mains après avoir pris les transports en commun… C’était en février 2020, selon une étude menée par l’Ifop pour Diogène France ; nul doute que les chiffres seraient différents aujourd’hui, après la pandémie. Considéré (encore un peu plus) comme l’un des accessoires de notre routine pluriquotidienne, le savon est investi depuis quelques années par de nombreuses marques, des grands noms du luxe aux spécialistes historiques, en passant par la jeune garde. Et, de la même façon que l’on soigne l’origine de son pain de campagne ou la provenance de sa bougie, la signature de son savon fait partie de ces petits snobismes devenus des marqueurs sociaux – bien plus que les signes ostentatoires. Le meilleur exemple ? Le flacon marron de gel lavant Aesop, un investissement de 31 euros pour indiquer à ses invités « qu’on en est ». Enfin, qu’on en était, car, depuis, le modèle a été détrôné par le retour de sa version solide, plus naturelle et surtout plus écologique. « On le trouve dans le bassin méditerranéen, avec une base d’huile de laurier, depuis plus de trois mille ans : c’est le fameux savon d’Alep. Un produit très prisé des Romains, qui s’est diffusé par Venise, importé par les croisés, avant de faire escale à Marseille », retrace rapidement Véronique Drecq, directrice de la chaire Leading a Beauty Brand, à l’Essec Business School. Une passionnante histoire qui a fait l’objet d’une exposition, « Bains, bulles et beautés », au musée de la Parfumerie de Grasse, en 2014. « Après une période de défiance vis-àvis de l’eau pour la toilette, et donc du savon – surtout au XVIIe siècle –, on assiste à un retour hygiéniste au XIXe, où le savon devient un produit parfumé et raffiné, avec des acteurs comme Yardley en Angleterre, puis Roger & Gallet en France, ou Monsavon au XXe siècle », poursuit Véronique Drecq. Et, si la barre solide est devenue un objet de grande consommation que l’on trouve dans les supermarchés, à bas prix, il en existe toujours des versions plus chics, plus parfumées, plus délicates. « La crise sanitaire en a fait une star. C’est un produit qui lave, assainit, chasse les odeurs, sans compter l’idée de simplicité et de transmission familiale qu’il véhicule », affirme la spécialiste de l’industrie du luxe. Certains érigent même la saponification en métier d’art, avec finesse de la mousse, délicatesse du parfum, matières premières bio, moulage artisanal… La barre de savon, nouveau produit de luxe ? ■