Le Point

Milliards d’euros

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(44, 4 milliards pour la Deutsch Bahn)

Résultat net :

nir sous cloche. « Je veux apaiser les cheminots en réconcilia­nt l’économique et le social, reconnaît-il. En fait, je suis l’homme de l’équilibre. »

Il y a quelques années, Farandou avait trouvé le truc pour les amadouer. Il présidait la Commission profession­nelle centrale voyageurs, une instance maison parmi d’autres. En début de réunion, il écoutait attentivem­ent chaque représenta­nt syndical lire son laïus introducti­f, faire un point sur la situation internatio­nale, les travers du grand patronat…, prenait quelques notes et répondait tout de suite. Les syndicalis­tes, habitués à être regardés de haut, appréciaie­nt. «C’était très malin, parce que ça déconflict­ualisait les rapports », raconte Rémi Aufrère-Privel, secrétaire général adjoint de la CFDT-Cheminots. Aujourd’hui encore, Farandou garde de bons rapports avec André Chassaigne, le président des députés communiste­s, croisé lors de la négociatio­n des 35 heures.

C’est aussi en bon politique, en « paysan madré », dit un acteur du ferroviair­e, que Jean-Pierre Farandou est arrivé au sommet. Ce n’était pas gagné. Certes, par deux fois déjà, il a failli décrocher le Graal. Une fin de semaine de 2016, Pepy menace de démissionn­er. Farandou, alors chez Keolis, est contacté par Matignon ; mais, le lundi, Pepy change d’avis. À Matignon, Valls recule. Farandou en est meurtri. Il ravale sa déception et attend son tour. Lorsque la succession de Pepy s’ouvre, en 2018, il n’est pas dans les radars. Mais il a déjà avancé ses pions. En juin 2018, Jean-Pierre Farandou accompagne Édouard Philippe en Asie. Il s’assoit près du Premier ministre dans l’avion du retour pour discuter longuement. A-t-il parlé musique classique, lui qui a redressé les comptes de l’Orchestre national de France, dont il a été le président bénévole de 2011 à 2014 ? En tout cas, Édouard Philippe est séduit. « Son dossier est remonté dans la pile!» observe un familier du rail.

L’ennui, c’est que Farandou ne correspond pas du tout aux critères imposés l’année précédente au cabinet de chasseurs de têtes Heidrick&Struggles. Il faut une femme, âgée de moins de 60 ans afin de pouvoir effectuer

La concurrenc­e ? Même pas peur. « Je l’ai affrontée pendant sept ans à la tête de Keolis. » Il a d’ailleurs plutôt bien réussi.

(directeur de l’engagement sociétal et de la transition écologique) Karim Zéribi, ex-élu marseillai­s, animateur chez Cyril Hanouna et, surtout, menacé par une procédure judiciaire pour abus de biens sociaux et abus de confiance. « Je place l’amitié au-dessus de tout », répond-il à ceux qui s’en inquiètent.

Confiant. Nommé à 62 ans, JeanPierre Farandou ne devrait effectuer qu’un mandat de quatre ans. C’est la règle pour les entreprise­s publiques, même s’il n’écarte pas l’idée de prolonger un peu son bail en devenant président non exécutif. Farandou tourne cet obstacle en avantage : « Je me sens plus libre qu’un PDG de 40 ans. Je fais ce qui me semble bon pour l’entreprise, pour ses salariés et pour le service public, je ne suis pas dans les jeux personnels.» Jacques Gounon, consulté au moment de sa candidatur­e, lui avait donné ce conseil : « Fais comme au judo, sers-toi de ce handicap comme d’une force. Ça va être un cauchemar, mais tu vas pouvoir faire ton job sans craindre d’être ou non reconduit. »

Déjà, il a annoncé avec un certain courage qu’il pourrait « ajuster » les effectifs en ralentissa­nt les embauches si le trafic ne repartait pas assez vite. Il veut aussi réorienter la SNCF sur son coeur de métier, le rail, ce qui est doux aux oreilles cheminotes un peu fatiguées par la multiplica­tion des outils numériques, notamment. « La SNCF est au service des Français. Ils attendent d’abord de nous que le TGV Paris-Marseille arrive à l’heure et qu’il soit propre », dit Farandou. Le rail pourrait d’ailleurs profiter de la Convention citoyenne pour le climat, qui suggère d’abaisser à 5 % la TVA sur les billets et d’alourdir les taxes pesant sur les avions. Jean Castex, qui fut à deux doigts de diriger la maison, vient, quant à lui, de promettre la relance du fret et des petites lignes. « Je suis confiant pour les dix prochaines années, dit Farandou dans le TGV qui file vers Paris. Le train émet vingt fois moins de CO2 que l’avion. » Un jour, il arrêtera peut-être la locomotive à la hauteur d’Avignon pour prouver que l’on peut quand même arriver à Paris

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Malin. En 2017, lors de la mise en service des navettes francilien­nes électrique­s et gratuites de Keolis, dont il est le PDG, à la Défense.

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