Le décolonialisme dans les thèses universitaires
Praxis queer
« Aujourd’hui, des universitaires comme Paola Baccheta ou des militantes comme Amandine Gay permettent enfin de visibiliser l’intersectionnalité des luttes queers et de la critique décoloniale en France. Les pratiques queers ont en commun de faire du corps une arme politique et de militer contre les différentes formes d’oppressions et de normalisation des corps et des identités. Le Grupo de Trabajo Queer de Madrid (dit GTQ, “Groupe de travail queer”), constitué de personnes militantes, déclare ainsi : “Ce que nous dénonçons est un régime hétérosexuel qui anéantit toute forme de sexe/genre/désir ne s’ajustant pas à vos impossibles critères normatifs. […] La libération du désir ne pourra advenir que lorsque se sera écroulée votre identité hétéro. Nous ne combattons pas contre vous sinon contre votre normalité”. […] La théorie queer est avant tout constituée de savoirs militants produits en dehors de l’université. En pensant ensemble les auteur·e·s et les groupes cités, les pratiques queers apparaissent comme une résistance à la norme, un outil de pensée critique. »
Extrait de la thèse « Praxis Queer : les corps queers comme sites de création et de résistance » (université Charles-deGaulle, Lille-3, 2018).
Pensée « post-abyssale »
« La pensée occidentale moderne est “abyssale”, en ce qu’elle se fonde sur une invisibilisation de tout ce qui se trouve “de l’autre côté de la ligne”. Par conséquent, la lutte pour une justice sociale globale exige la construction d’une pensée “post-abyssale”, c’est-à-dire une reconnaissance d’autres formes d’appréhension du monde, d’autres formes cognitives. Dès lors que le savoir est toujours intervention dans le monde, la lutte pour la justice sociale globale passe par la promotion de “l’écologie des savoirs”. Celle-ci consiste en un dépassement de la monoculture du savoir scientifique, en concevant les savoirs non scientifiques comme des alternatives au savoir scientifique. »
Extrait de « Penser l’alimentation d’un point de vue décolonial » (« Revue des sciences sociales », Presses universitaires de Strasbourg, 2019).
Le corps déviant
« Ce sont principalement les corps des personnages, et particulièrement leurs attributs genrés et sexuels, qui vont permettre de faire surgir les discours politiques du film. Que le “méchant” porte son malheur sur son visage et sur son corps est loin d’être une innovation du cinéma, et les sorcières des contes de fées, par exemple, sont caractérisées par l’adéquation exacte entre leur psyché et leur physique. La caractérisation par la déviance qui définit dès l’origine les personnages terroristes semble remplir une fonction différente et provoque des effets bien particuliers. Le corps déviant est le produit involontaire d’une norme qu’il rappelle à chacune de ses manifestations : le corps terroriste est aussi trop grand ou trop viril, trop efféminé ou perversement hommasse. À chaque fois, il rappelle que la norme en matière de genre, de race et de sexualité est évidemment celle du héros, James Bond. »
Extrait de la thèse « Corps de terreur : genres, races et sexualités dans les représentations hollywoodiennes du terrorisme (1960-2010) » (Paris-3)