Bourse : la gestion thématique est-elle pertinente ?
Depuis près de quatre ans, le nombre de fonds communs de placement consacrés à un thème explose. Ils seraient l’alpha et l’oméga de la gestion active, permettant de surperformer les indices grâce à une croissance supérieure à la moyenne. Leur développement ne date pas d’hier. « Cette gestion se pratique depuis plus d’un demi-siècle », relève Julie Lespinas, responsable relations clientèle chez Richelieu Gestion. Mais leur nombre (923, dont 293 en Europe fin 2019, selon le décompte de Morningstar), leur encours (195 milliards de dollars, dont 105 en Europe) et la diversité des thèmes proposés ( intelligence artificielle, big data, robotique, sport, sécurité, bien-être, eau, transition énergétique) en font un produit très demandé.
« En 2020, les fonds thématiques ont représenté les deux tiers de la collecte », constate Hervé Thiard, directeur général de Pictet Asset Management. Avec quelques dominantes. Les thématiques liées à la technologie, et plus spécialement à la robotique, ainsi que celles de l’environnement concentrent l’essentiel des souscriptions et des encours. « Le mérite de ces fonds est de permettre aux investisseurs de s’échapper des allocations purement géographiques, voire sectorielles », commente Michel Dinet, directeur du développement de Richelieu Gestion. « La vertu des fonds thématiques est d’être
New York
Nombre de fonds thématiques
Encours, en milliards de dollars
C’est la croissance des encours des fonds thématiques au niveau mondial (source Morningstar) entre 2016 et 2019.
en phase avec une tendance de long terme qui dépasse la notion de cycle et les modes, d’avoir identifié une demande en forte croissance qui n’est pas encore complètement satisfaite, relève Hervé Thiard. Le fonds thématique répond aussi au souhait de plus en plus affirmé de l’investisseur de donner du sens à son épargne. Il sait dans quoi il investit : les énergies nouvelles, la santé… Il lui permet enfin d’être plus diversifié, le fonds étant davantage exposé au monde et aux petites et moyennes valeurs. » Mais ces fonds ne sont-ils pas plus risqués ? L’objectif d’un fonds thématique est de faire mieux que son univers en sélectionnant les valeurs les
Tokyo plus performantes. Encore faut-il que son univers soit suffisamment large pour offrir une bonne diversification. D’où les difficultés rencontrées par des fonds thématiques qui, dans le passé, se sont confondus avec un secteur (la finance, les télécoms) ou ont manqué de diversité, à l’instar des fonds créés sur l’obésité ou l’alimentation bio. « Ils présentent des biais : être davantage axés sur des valeurs de croissance au détriment des values, être surexposé en matière de secteurs (la tech ou la santé, par exemple) ou de pays (les États-Unis, notamment)», reconnaît Hervé Thiard. Et Michel Dinet de renchérir : « Investir sur une seule thématique ou sur des thématiques proches – l’intelligence artificielle et les big data, par exemple – parce qu’on a raconté à l’investisseur une belle histoire ou qu’on a fait naître une émotion peut générer une exposition hypertrophiée sur certaines valeurs, nuisible à la diversification des risques. La gestion thématique n’exonère pas de la réflexion en matière d’allocation d’actifs et de gestion des risques. D’où la nécessité de les pondérer et d’être multithème. »
Ces fonds seraient-ils aussi un moyen de s’exonérer des comparatifs ? Ils permettent d’échapper à des classements et il n’est pas non plus toujours possible de les comparer au sein d’une thématique. Un risque que seule la performance permet de relativiser
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