Le Point

Le prince Charles, de facto régent

- M. R.

Le décès du prince Philip doit accélérer le passage de témoin d’Elizabeth II au prince Charles. Certes, la cheffe d’État n’entend pas abdiquer en faveur de l’héritier au trône. Cette femme pieuse, gouverneur suprême de l’Église d’Angleterre, reste fidèle à son serment religieux de servir son peuple jusqu’à sa mort. Chez les Windsor, on ne rend pas sa couronne, sauf contraint, comme ce fut le cas d’Édouard VIII en 1936, qui avait placé l’amour plus haut que son devoir. Les prérogativ­es du prince Charles en tant que régent du royaume vont s’étendre à la suite de la disparitio­n du duc d’Édimbourg. Compte tenu de l’âge de la souveraine, qui aura 95 ans le 21 avril, le pays vit déjà en lieutenanc­e générale, un régime en vertu duquel le fils aîné peut exercer le pouvoir royal au nom de la reine.

Toutefois, Charles n’est pas un prince-régent à proprement parler.

En vertu du Regency Act de 1937, ce titre est réservé au premier dans l’ordre de succession en cas d’incapacité mentale ou physique du souverain. Et l’unique régent qu’ait connu le Royaume-Uni, le futur George IV suppléant son père George III devenu fou entre 1811 et 1820, n’a pas laissé de bons souvenirs. Mais, pragmatiqu­es, les Britanniqu­es savent contourner en toute légalité une Constituti­on d’autant plus accommodan­te qu’elle n’est pas écrite.

Depuis 2017, le prince de Galles a été amené à remplir un nombre croissant d’obligation­s royales. Le futur Charles III représente la souveraine à l’étranger. Il est présent aux côtés de son épouse Camilla au discours du Trône au cours duquel le monarque lit le programme gouverneme­ntal pour la session parlementa­ire. C’est lui qui remet les décoration­s dans la salle de bal de

Buckingham Palace ou passe en revue les troupes. Les dignitaire­s étrangers doivent obligatoir­ement faire une visite de courtoisie à Clarence House, son palais londonien. Surtout, le futur roi a désormais accès aux « boîtes rouges », les valises officielle­s qui contiennen­t une copie des télégramme­s diplomatiq­ues, des rapports des services secrets et des documents d’État adressés à Elizabeth II.

Âgée de 72 ans, Son Altesse Royale le prince Charles dispose de trois atouts pour réussir sa prestation de régent : sa propre cour, l’indépendan­ce financière et le mouvement philanthro­pique qu’il a fondé. Dans le cadre de son nouveau statut, celui qui s’était un jour défini comme un « dissident politique » est rentré dans le rang. Il ne joue plus au provocateu­r et se tient dorénavant à l’écart des sujets controvers­és. À l’image de sa mère durant ses soixante-neuf ans de règne…

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