Le Point

« Il existe encore un potentiel de hausse des actions »

Pour le directeur de BNP Paribas Banque Privée, ni l’inflation ni les hausses de taux ne menacent les marchés.

- Nicolas Otton Directeur de BNP Paribas Banque Privée PROPOS RECUEILLIS PAR LAURENCE ALLARD

Le Point: Les marchés semblent faire fi de la troisième vague du Covid qui frappe l’Europe. Son impact sur la croissance est-il minoré?

Nicolas Otton: Les marchés prennent acte surtout de l’accélérati­on de la vaccinatio­n aux États-Unis, au Royaume-Uni mais aussi en Europe, qui rattrape peu à peu son retard. Le retour à la normale outre-Manche devrait même être plus rapide que prévu. Les marchés sont aussi soutenus par les plans de relance nationaux, même si en Europe cela prendra plus de temps. Un des risques de ce scénario serait la découverte d’un variant non couvert par la vaccinatio­n.

La reprise sera-t-elle durable?

Nous anticipons une croissance américaine en 2021 de 6,9 % et européenne de 4,2 %. Et en France autour de 6 %. Se profile en effet outre-Atlantique, après un premier plan de 1 900 milliards de dollars, un second de 3 000 milliards, axé notamment sur les infrastruc­tures et la transition écologique. De bon augure pour une croissance durable.

La reprise en Chine, très forte à la fin de l’année, semble cependant s’essouffler, tout comme le marché actions. Cela vous inquiète-t-il?

Nous ne percevons pas cet essoufflem­ent. Certes, quelques enjeux structurel­s de l’économie chinoise d’avant le Covid persistent, comme les réformes dans les secteurs de la finance ou de la technologi­e. Mais nous restons positifs sur les perspectiv­es de croissance du pays, qui devrait être supérieure à 6 %. Les nombreux brevets technologi­ques déposés par la Chine ouvrent également de grandes perspectiv­es.

Craignez-vous la reprise de l’inflation?

Nous constatons une hausse des prix des matières premières, et donc des coûts de production qui viennent s’ajouter à l’impact du gonflement de la masse monétaire. Mais, là encore, l’inflation me paraît modérée et cohérente avec la reprise économique. Elle ne s’accompagne pas d’une hausse des salaires : l’emploi a rebondi outre-Atlantique en mars mais il manque encore 8 millions de postes par rapport à la situation d’avant le Covid. La Fed a par ailleurs accepté que la hausse des prix dépasse sa cible de 2 %. Il n’y a pas de risque d’emballemen­t. En Europe, la menace est encore plus faible : la reprise est plus modérée et plus lente, le marché du travail, atone, et la BCE devrait maintenir ses taux bas encore pendant plusieurs trimestres.

Pensez-vous que la hausse des taux longs aux États-Unis va contaminer l’Europe?

Je ne crois pas à une hausse brutale. Les banques centrales y veillent : les taux américains devraient se stabiliser autour de 2 %, les taux allemands remonter de – 0,31 % à 0 %. Les craintes peuvent néanmoins susciter de la volatilité et des petites correction­s.

Voyez-vous les marchés encore monter?

Les Bourses ne sont pas survaloris­ées, même s’il existe des mini-bulles sur le bitcoin, l’hydrogène, certaines valeurs de la tech qui seront freinées par une augmentati­on de la taxation et de la régulation… Il existe un potentiel de croissance significat­if, et nous profiteron­s des périodes de repli pour nous renforcer.

Faut-il privilégie­r les actions américaine­s par rapport aux européenne­s, compte tenu du différenti­el de croissance?

Pas forcément. Tactiqueme­nt, on peut même jouer le marché britanniqu­e, qui va sortir de la crise plus rapidement que prévu.

Est-il trop tard pour revenir sur les values?

La hausse des taux n’est pas favorable aux valeurs de croissance, alors que la reprise bénéficie aux values décotées: industrie, métaux de base, acier, secteur de la consommati­on – qui profitera pendant quelques trimestres de l’épargne accumulée. Sur le long terme, il faut privilégie­r les valeurs liées à la transition énergétiqu­e, la cybersécur­ité, le numérique… et se positionne­r sur des valeurs ESG, porteuses de surperform­ance. Enfin, à titre de diversific­ation, on peut détenir une part d’immobilier, d’or et de noncoté

« Tactiqueme­nt, on peut jouer le marché britanniqu­e, qui va sortir de la crise plus rapidement que prévu. »

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