Nicolas Becker : il a l’oreille de Hollywood !
Son oscar a fait moins de bruit que celui de Florian Zeller. Ironie du sort : c’est pour un film sur la surdité que le superviseur du son Nicolas Becker a remporté la statuette dans sa spécialité, faisant de lui, à 50 ans, la coqueluche des réalisateurs américains. Ça ne s’invente pas. Dans Sound of Metal de Darius Marder, Ruben, un jeune batteur de heavy metal (Riz Ahmed) perd du jour au lendemain la quasi-totalité de son audition. L’horreur. Et, pour reproduire au plus près la perception d’un monde ouaté par le personnage, Nicolas Becker a multiplié les idées peu orthodoxes. Avant le tournage, il a fait venir à Paris le réalisateur, dans les locaux de l’Ircam, pour l’enfermer trente minutes dans une chambre anéchoïque privée de lumière. « Il ressentait tous les bruits de son corps, son coeur, sa pression artérielle, ses tendons… Une expérience précieuse pour comprendre le ressenti de son héros », nous confie Becker. Ce dernier a aussi enregistré des répliques de Riz Ahmed en l’équipant de quatre micros atypiques, dont un géophone utilisé dans l’industrie pétrolière et un hydrophone dans la bouche, afin de mieux capter les sons organiques de l’acteur. Notre sound designer (qui n’est
« pas ingénieur du son », précise-t-il) a aussi mobilisé de nouveaux logiciels expérimentaux pour créer les ambiances effrayantes et chaotiques perçues par Ruben lorsqu’il se fait poser un implant cochléaire défectueux. Au final : un film à l’immersivité sonore unique et un artiste toujours plus courtisé par le 7e art – Becker a, entre autres, supervisé le son de 127 Heures, Gravity, Premier Contact ou encore Le Chant du loup. Depuis l’oscar, son téléphone se déchaîne de plus belle, et Nicolas Becker figurera notamment aux génériques des prochains films d’Iñarritu et de Soderbergh. Bref, un talent français reçu cinq sur cinq à Hollywood ■
En salles le 16 juin.