Joaillerie : l’exposition « Pierres précieuses »
Ne pas oublier que les trésors de la place Vendôme naissent de la terre : une conversation rare entre minéralogie, gemmologie et joaillerie que rappelle le Muséum national d’histoire naturelle.
Le Rocher aux merveilles Un objet unique conçu par Van Cleef & Arpels spécialement pour l’exposition « Pierres précieuses ». Clip Licorne merveilleuse : or, saphirs, diamants. Chimère : or, saphirs de couleur, émeraudes, rubis, grenats tsavorites, perles de culture blanches, diamants. Bague Nature bicolore : or, tourmaline vert et rose taille émeraude de 24,88 carats, émeraudes, saphirs roses, diamants. Clip Fée Ostara transformable en pendentif or, un grenat spessartite ovale de 5,31 carats, émeraudes, saphirs mauves, diamants. Trois clips Laurier-Rose : or, rubis, saphirs, diamants. En cascade, clip Fée Palmyre bleu : or blanc, saphirs, diamants et boucles d’oreilles Palmyre bleu : or blanc, saphirs, diamants.
Sur un socle de quartz de 13 kilos, légèrement poli pour en aplanir la surface, un bloc de lapis-lazuli figure une montagne bleue aux flancs irréguliers. Ce bloc a été conservé à l’état brut, tel que la nature l’a forgé. À sa base et à son sommet, 32 cristaux de tourmaline fixés verticalement font penser à une forêt. Cette impression est renforcée par la présence d’une faune et d’une flore étincelantes, neuf créations de haute joaillerie transformables, qui métamorphosent cette sculpture minérale en manifeste joaillier : une chimère de pierres précieuses cajole du regard une bague sertie d’une tourmaline bicolore, tandis que, se rafraîchissant près d’une cascade en diamants et saphirs, une licorne et deux fées côtoient des fleurs de laurier dont la corolle de saphirs rose et mauve abrite au choix un saphir pourpre de Madagascar, un saphir bleu du Sri Lanka ou un rubis du Mozambique.
Le tout compose un décor onirique évoquant les paysages de contes ou les épopées baroques telles que Roland furieux, de Ludovico Ariosto. Une histoire porteuse d’enchantement comme l’affectionne Van Cleef & Arpels, dont la signature stylistique et le savoir-faire se
500 minéraux, pierres et objets d’art du Muséum sont mis en regard avec 200 gemmes et créations de Van Cleef & Arpels.
lisent dans la qualité des pierres brutes ou facettées, mais aussi dans la diversité des sertis – serti clos, semi-clos, à grain ou à griffe, serti neige – qui vivifient cette composition. Un objet de défis et de secretsdontlaréalisationaexigé4700 heures de travail de joaillerie, plus de 1 200 heures de sertissage et près de 500 heures de polissage. Deux ans de travail.
Continuum. L’installation porte un nom : le Rocher aux merveilles. Elle cristallise et résume l’exposition «Pierres précieuses », dont elle est la surprise finale et la conclusion. Voulu et imaginé par Nicolas Bos, cet objet unique fait écho à une autre oeuvre dont la présence, jusqu’au 22 août prochain, au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) de Paris, réjouit le président de Van Cleef & Arpels : « C’est une pièce remise en état à la faveur de l’exposition : l’arbre aux tourmalines créé par Jean Vendome. Une oeuvre d’art au carrefour de la joaillerie, du design et de la sculpture. »
L’exposition elle-même s’inscrit dans une histoire de partenariat entre le joaillier et le Muséum. En 2016 déjà, «The Art & Science of Gems », à Singapour, dévoilait pour la première fois en Asie des pièces des réserves du musée, entre joyaux de la Couronne de France, pierres de rêve de Roger Caillois, cristal géant de quartz dit « de Napoléon ». Nicolas Bos et Bruno
David, président du MNHN, poursuivent cette aventure au Jardin des Plantes. Cinq cents minéraux, gemmes et objets d’art (comme la table des Orsini, ci-contre) des collections du Muséum sont mis en regard avec 200 gemmes et créations joaillières puisées dans la collection patrimoniale de Van Cleef & Arpels. Une espèce de grande fresque reliant la matière brute à la création : des plus anciens bijoux du monde (un coquillage percé datant de 90 000 ans trouvé en Algérie), offrant le témoignage de la première révolution cognitive de l’Homo sapiens, aux sept principes géologiques à la base de la formation des pierres.
L’occasion d’admirer, aux côtés de gemmes extraordinaires, des créations exposées pour la première fois en France, comme la collerette en diamants et platine de 1939 de la reine Nazli d’Égypte. La transversalité de plusieurs mondes dresse une forme de continuum entre les productions de la nature et la célébration qu’en ont fait les lapidaires et les créateurs de bijoux. « Notre collaboration avec le Muséum s’inscrit dans une longue tradition de dialogue entre l’esthétique et la science, entre l’art et la technique », conclut Nicolas Bos. Un art de la conversation où chaque discipline – la minéralogie, la gemmologie et la joaillerie – interroge sa part d’éternité ■