Alzheimer : faux espoir ou vrai mirage
VIEILLISSEMENT Compassion contre raison, émotion contre sang-froid. L’agence sanitaire américaine (FDA) vient d’agréer un nouveau traitement, discutable et discuté, contre la maladie d’Alzheimer. Cette décision clôt une procédure accélérée qui vise à examiner, dans les plus brefs délais, une molécule susceptible de soigner une maladie grave, actuellement inguérissable. L’aducanumab, commercialisé par le laboratoire Biogen sous le nom d’Aduhelm, est un anticorps monoclonal qui agit sur l’une des causes possibles de cette neurodégénérescence, l’accumulation de protéine amyloïde à l’origine de la formation de plaques séniles dans le cerveau. Il est administré par voie intraveineuse.
Après deux décennies d’échec de la recherche, la mise sur le marché puis la suspension de quatre premières pilules, les familles, les associations de malades et les médecins les prenant en charge pourraient nourrir de solides espoirs avec cette nouveauté américaine. Environ 50 millions de personnes souffrent de cette maladie dans le monde, dont près de 1 million en France. Problème, l’aducanumab et plusieurs autres molécules voisines développées par la firme américaine Eli Lilly, la suisse Roche et la japonaise Eisai n’ont pas démontré d’efficacité clinique sur les symptômes de cette démence au cours des essais cliniques auxquels elles ont été soumises. En 2019, Biogen interrompait l’expérimentation de sa molécule après une analyse intermédiaire qui n’avait retrouvé aucun effet positif sur la cognition et l’autonomie fonctionnelle des malades. Quelques mois plus tard, une nouvelle analyse des mêmes données concluait à un bénéfice pour les patients prenant la dose la plus élevée. Tripatouillage des données, alertent certains. Depuis, aucune autre étude n’a confirmé ou infirmé ces résultats problématiques.
Terrible et désespérante, la maladie d’Alzheimer permet-elle de déroger aux règles rigoureuses de l’évaluation et de l’autorisation des produits de santé, fondées sur les preuves ? L’Agence européenne des médicaments, à qui le dossier de l’aducanumab est soumis, donnera bientôt sa réponse
■