Été breton
Ne faut-il pas disposer de certains dons de druidesse pour concocter breuvage aussi ensorcelant ? Si la Bretagne intérieure, « celle des calvaires et des chapelles, des rochers moussus, des fougères et des feuilles mortes tapies sous les arbres », ne vous effraie pas, alors vous passerez l’été en compagnie de Claire Léost dans un petit village baptisé Le Bois-d’en-Haut. Deux enterrements viennent d’y avoir lieu le même jour. Ce n’était pas arrivé depuis 39-45. Le destin de trois femmes va se dénouer ici. Marguerite, la professeure de français venue de Paris effectuer un remplacement. Hélène, sa brillante élève, rêvant d’une autre vie de l’autre côté des monts d’Arrée. Et Odette, qui, après avoir fui la misère de l’après-guerre, a suivi l’itinéraire de nombreuses Bretonnes : bonne à tout faire dans la capitale. Entre toutes les trois, un point commun : l’émancipation par l’éducation. On croise aussi des hommes : un militant breton, un auteur de polars, un prêtre « défroqué » au sens propre…
Le lecteur progresse dans l’intrigue du Passage de l’été comme sur les sentiers de la forêt de Brocéliande. Le mystère se dissipe peu à peu, telle une brume automnale. Les secrets de famille dorment sous des blocs de granit. Et l’amour se révèle aussi pudique qu’un frôlement de fougères. La véritable héroïne de Claire Léost se nomme la Bretagne, dépeinte ici dans son « ossature primitive ». Elle a jeté un sort à tous ces personnages. Aucun d’entre eux ne parvient à y échapper. La raison et la superstition se disputent le coeur des fées de cette légende envoûtante ■
Le Passage de l’été, de Claire Léost (Lattès, 269 p., 20 €).