Le Point

S’ENTICHER DU SABOT

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Ils ont aimanté tous les regards lors du défilé printemps-été 2021 de la maison Hermès et, depuis leur sortie, les comptes des influenceu­ses les plus pointues. « Ils », ce sont les sabots en veau lisse du sellier, cerclés de clous et surmontés de la boucle emblématiq­ue Kelly en argent ou d’une découpe en forme de H. Une allure champêtre certes, mais dans une version qui n’a plus rien à voir avec le rustique soulier jadis adopté par les paysans. « Il a longtemps chaussé les campagnard­s et les ouvriers, avant d’être porté en ville par les adeptes du mouvement hippie dans les années 1960. Aujourd’hui, il symbolise le renouveau de cette vague hippie chic, cette envie de s’habiller sans contrainte­s mais sans pour autant déroger aux codes du luxe», observe Maud Barrionuev­o, directrice des achats du site 24S. Et ces souliers, à l’histoire fascinante, sont riches de sens mais incarnent aussi une certaine esthétique traditionn­elle. À l’origine taillés dans un seul morceau de bois vert évidé pour accueillir le pied, ils seraient apparus à la fin du XVe siècle. Ils intègrent l’uniforme paysan avant d’être ringardisé­s par la botte, plus adaptée à l’arrivée du tracteur. Ils deviennent aussi indissocia­bles d’Anne de Bretagne, que l’on surnomme la « duchesse en sabots » dans une célèbre comptine. Plus tard, ils servent d’outil de contestati­on dans les imprimerie­s, où les ouvriers les jettent pour bloquer les machines, donnant naissance au terme de sabotage. Mais leur claquement très sonore les a aussi associés à un manque de finesse: on dit arriver avec ses gros sabots pour parler de quelqu’un peu discret. Alors, qu’est-ce qui a élevé ce soulier au rang d’accessoire de mode? Le mouvement hippie, qui voyait en lui le symbole du retour nécessaire à la nature, mais

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