Roman – L’inspecteur Jaenada a encore frappé
Avec Au printemps des monstres, Philippe Jaenada revient sur un fait divers fascinant des années 1960.
Printemps 1964. Le corps sans vie d’un petit Parisien de 11 ans, Luc Taron, est retrouvé dans un bois. Bientôt, un mystérieux corbeau, « l’Étrangleur », revendique l’assassinat en inondant de ses missives les journaux complaisants, sous l’oeil avide du grand public.
Centré sur cette affaire sordide, Au printemps des monstres, avec ses – tout de même ! – 752 pages, pourrait être un livre étouffant. Et pourtant, par la grâce de l’intelligence, de l’humour et de la délicatesse de Philippe Jaenada, c’est l’un des bonheurs de lecture de cette rentrée. Comme dans La Petite Femelle (sur l’affaire Pauline Dubuisson, qui tua son ex-fiancé dans les années 1950) ou La Serpe (prix Femina 2017, sur l’auteur Georges Arnaud, accusé dans sa jeunesse d’avoir sauvagement massacré sa famille), Jaenada décortique un fait divers et fait resurgir les failles de l’enquête et de la justice. Car si un homme fit bien quarante et un ans de prison pour le meurtre de Luc – un record sinistre –, l’écrivain doute de sa culpabilité. Et non sans arguments, puisqu’il s’est minutieusement plongé dans les archives, les rapports de police, en passant par la correspondance du condamné avec son avocat, le ténor Maurice Garçon, pour traquer les détails qui ne collent pas avec la conclusion officielle…
Pourquoi cette obsession pour les assassinats ? «Un fait divers, on ne peut pas faire plus simpliste ou stupide a priori : le meurtre de Luc, c’est un acte de barbarie ou de folie, concède Jaenada. Et pourtant, en tant que romancier, cela m’offre une porte d’accès exceptionnelle sur le réel. Comme la serrure peut être le meilleur endroit pour regarder une pièce, le fait divers est le meilleur poste d’observation des comportements humains. » Surtout dans ce qu’ils ont de pire. Car ce que révèle l’affaire Moulet, c’est la face sombre des sixties. « Pour
« Le fait divers, en tant que romancier, m’offre une porte d’accès exceptionnelle sur le réel. » Philippe Jaenada