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« Ma mère a eu 24 enfants »

Une seule femme peut-elle avoir 24 enfants ? Un tel nombre paraît extraordin­aire. Pourtant, c’est le nombre de bébés qu’une brecéenne a eu entre 1929 et 1946 d’après ses enfants. C’est un record de fécondité français. L’un de ses fils raconte.

- Guillaume Jeanne

Souvent, quand on pense à une famille nombreuse aujourd’hui, on se dit que 5 enfants, c’est déjà pas mal. Cependant, dans les années 50, il était plus fréquent pour une femme d’avoir jusqu’à 10 ou 15 enfants.

Sans discontinu­er pendant 17 ans

Mais la mère de Philippe Brault, Marie-Louise Bioche, épouse Brault, elle, en a eu 24, en une vingtaine de grossesses ! « Elle a été en couche dès l’âge de 18 ans (en 1929) jusqu’à 35 ans (en 1946) », détaille Philippe Brault, l’un de ses fils. Soit quasiment sans arrêt pendant 17 ans. À peine un enfant était-il né que la femme était de nouveau mise enceinte, et qu’un nouveau bébé arrivait. « À quelques exceptions près, elle en faisait un par an ! Elle les a tous eus du même père, Robert Brault ». Le chiffre de 24 enfants est celui que MarieLouis­e Brault, et ses nombreux enfants, ont toujours affirmé. « Il n’y a jamais eu de fausses couches ».

Une femme mince

Philippe Brault, lui, est le 20e de la fratrie. Aujourd’hui, il n’a plus que deux soeurs à lui qui sont vivantes. Elles habitent toutes les deux à Laval. « Ma mère était une petite bonne femme, très mince ». En apparence rien ne corroborai­t l’extraordin­aire constituti­on de cette Mayennaise qui pu accomplir autant de fois ce cycle complexe pour l’organisme qu’est la gestation.

Les sécurités

Sur les 24 enfants, 14 sont nés à Parigné-sur-Braye, le plus souvent au domicile, près de l’église, mais pas toujours. « Certains sont nés dehors, sur le bord d’une route, dans un jardin, où à l’hôpital ». À l’époque, quand le bébé venait, il venait, il n’y avait pas les sécurités qu’il y avait aujourd’hui. « Moi, je suis né sur le bord d’une voie, je ne sais plus bien laquelle », sourit Philippe Brault.

Pour les dix autres enfants, le lieu de naissance dépend de l’endroit où se trouvait MarieLouis­e au moment de l’accoucheme­nt. Parfois, elle était à l’hôpital (Laval, Mayenne), ou au travail. De ce fait, toutes les autres naissances seront enregistré­es dans un grand nombre d’autres communes.

Un village entier

Tous les enfants ne survivront malheureus­ement pas. Certains, trois, ne vécurent que quelques heures (notamment des jumeaux nés à Parigné les 24 et 25 mars 1941) ou quelques mois. Les autres sont devenus adultes. « Toute l’histoire a été notée sur les livrets de familles. Comme nous sommes très nombreux, nous en avons trois ! », s’amuse Philippe Brault.

Certaines des soeurs de Philippe Brault auront à leur tour jusqu’à une quinzaine d’enfants. « Une fois, nous avons tenté d’évaluer combien nous étions en tout, après plusieurs génération­s. Nous en étions arrivés à environ 300 », soit la population d’un petit village. Certains sont restés près de Parigné-sur-Braye, d’autres ont filé vers Brecé, Gorron, Ambrières, ou Mayenne. D’autres sont partis plus loin, à Paris, et même à Vichy.

Lorsque les records de familles nombreuses sont approchés, ces dites familles peuvent recevoir de la part de l’Etat un prix spécial, si elles en font la demande. C’est le prix Cognacq-Jay. « Ma mère l’a obtenu. C’était un diplôme et une médaille, mais c’était aussi une somme d’argent », de 25 000 francs. Une importante somme à l’époque, « idéale pour aider les parents à élever leurs enfants ».

Une réunion en 1975

En 1946, Marie-Louise cessera d’avoir des enfants mais la fratrie se retrouvera de temps en temps lors de repas, rarement au complet, les uns et les autres n’étant que trop peu disponible­s au même moment. « Mon père décédera en 1975 ». À cette occasion, beaucoup de frères et soeurs seront réunis (15 en tout). « Ma mère continuera de vivre encore longtemps ». Elle décédera à la maison de retraite en 2000, à 89 ans.

Philippe Brault regrette de ne pas avoir de photos rassemblan­t tous ses frères et soeurs, mais la vie n’a pas permis l’existence d’un tel cliché. « Les photos étaient rares à l’époque, ce n’est pas comme aujourd’hui. En plus, celles que nous avions prises ont été détruites lors de l’incendie de notre maison en 2004 à Ambrières-les-Vallées ».

Il n’en demeure pas moins que le cas de la famille Brault constitue très vraisembla­blement l’une des familles les plus nombreuses jamais observées en France. Il ne reste plus qu’à l’authentifi­er, en retrouvant tous les actes de naissances. Si des exemples à 17, 18 ou 19 enfants se trouvent relativeme­nt facilement, c’est beaucoup plus rare ensuite, car il faut dans ce cas des grossesses avec des jumeaux (ce qui est observé ici, à Brecé).

Les seuls autres exemples fiables avec des familles encore plus nombreuses n’ont jamais été observés dans notre pays, mais aux Etats-Unis, au Brésil, en Irlande, au Canada.

Un niveau mondial

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