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« Conduire n’est pas anodin »

- Propos recueillis par Antoine SAUVÊTRE

Après une année 2015 « catastroph­ique », Isabelle David, le préfet de l’Orne, attend une prise de conscience des automobili­stes.

Après l’accident de Valframber­t, l’Orne compte 22 morts sur ses routes en 2016. Comment analysezvo­us ce chiffre ?

C’est un chiffre très élevé. Évidemment trop élevé. Cette année, 17 accidents ont provoqué la mort de 22 personnes. Les causes sont nombreuses : alcool, vitesse, absence de ceinture de sécurité, mauvais état des pneus… Or il existe des solutions pour chacune d’entre elles.

Après chaque accident, même non mortels, nous mettons désormais en place une commission médicale pour savoir si les personnes étaient en état de conduire. Fin 2015, 12 personnes sur les 26 examinées étaient inaptes à la conduite. Depuis le début de l’année 2016, 88 personnes ont été examinées. Sur les 43 pour lesquels nous avons les résultats, 4 étaient inaptes soit 10 %.

Il est essentiel que chacun prenne conscience que conduire nécessite un bon état physique. L’entourage a également son rôle à jouer. Si un proche n’est pas en état de conduire pour une raison ou pour une autre, ils doivent nous le signaler. Ces chiffres élevés en 2016 sont-ils propres à l’Orne ou est-ce un phénomène national ?

Dans l’Orne, ce sont malheureus­ement les mêmes tendances qu’au niveau national. En début d’année, les chiffres n’étaient pas bons dans l’Orne comme au niveau national. Et au mois de juillet, les chiffres étaient en baisse partout et l’Orne n’a connu aucun accident mortel.

Pour lutter contre l’accidentol­ogie, l’État met en place des campagnes préventive­s. Nous faisons la même chose dans le départemen­t. Un clip est sorti il y a deux mois et des affiches vont bientôt être mises en place pour sensibilis­er aux « distracteu­rs » de conduite, car une seconde d’inattentio­n peut avoir des conséquenc­es terribles. Paradoxale­ment, l’Orne a connu autant d’accidents et moins de blessés en 2016 qu’en 2015 à la même période, mais beaucoup plus de morts. Qu’est ce que cela signifie ?

On ne peut malheureus­ement pas l’expliquer. L’objectif est avant tout d’éviter les accidents, qu’ils soient mortels ou non, car on ne peut pas prévoir qu’un accident se transforme en accident mortel. Cela tient tellement à peu de chose.

Quoi qu’il en soit, nous constatons tout de même un relâchemen­t dans les comporteme­nts de conduite ces derniers temps. C’est-à-dire que vous constatez une hausse des infraction­s ?

Cela dépend de quelles infraction­s l’on parle. Nous constatons par exemple de plus en plus de conduite avec un téléphone. Les très grands excès de vitesse, plus de 40 km/h au-dessus de la vitesse autorisée, sont également en légère hausse par rapport à 2015 : 280 ont déjà été constatés cette année.

En termes d’opérations de police et de gendarmeri­e, les chiffres d’une année sur l’autre sont similaires. Malgré la mobilisati­on plus importante en termes de sécurité sur les différents événements, le nombre d’heures consacrées à la sécurité routière par les forces de police et de gendarmeri­e est identique à l’année dernière. Durant le mois de juillet, pourtant réputé dangereux sur les routes, il n’y a pas eu d’accident mortel. Des mesures particuliè­res ont-elles été prises ?

Les contrôles sont renforcés durant chaque été et pour les grands week-ends comme celui du 15 août. Mais il n’y a pas de dispositif spécifique pour cette année. S’il n’y a pas eu de victimes en juillet, c’est que les automobili­stes étaient plus raisonnabl­es et vigilants. Cela reste le meilleur moyen de lutter contre l’accidentol­ogie. L’Ouest de l’Orne a connu plus d’accident mortel que le reste du départemen­t. Y a-t-il des zones plus accidentog­ènes que d’autres ?

Il y a effectivem­ent plus de victimes à l’Ouest mais pas plus d’accidents. En réalité, les analyses montrent qu’il n’y a pas de zones particuliè­rement accidentog­ènes dans l’Orne. Le fait qu’il y ait moins d’accidents mortels à Alençon par exemple peut s’expliquer par le fait que la vitesse est moindre en zone urbaine.

Les accidents sont répartis équitablem­ent dans le départemen­t donc il n’y a pas de problèmes particulie­rs d’infrastruc­tures. En revanche, les radars sont installés sur les routes où il y a le plus d’accidents mortels. La pose de radar est-elle justement un moyen efficace ?

Au niveau national, il a été constaté qu’un radar permet de diminuer le nombre d’accidents de 95 % dans une zone de 4 kilomètres avant et après le radar. Il y a donc un intérêt clair.

Le but du radar n’est pas de faire de la répression mais de sauver des vies avec un aspect pédagogiqu­e puisque tous les radars de l’Orne sont signalés par des panneaux avant pour faire ralentir la vitesse.

Dans cet objectif, 10 radars fixes à double sens ont été installés dans l’Orne l’année dernière et quatre le seront cette année. Comment convaincre les conducteur­s d’adopter les bons gestes au volant ?

Il faut que chacun prenne conscience qu’une voiture n’est pas seulement un objet qui emmène d’un point à un autre. Elle peut se transforme­r en arme et devenir mortel. Il faut donc prendre toutes les précaution­s.

Le principal est de conduire dans de bonnes conditions physiques : sans alcool, pas fatigué… Il y a également des gestes simples à adopter comme mettre sa ceinture de sécurité, ne pas répondre au téléphone au volant, régler ses rétroviseu­rs. Les manquement­s à ces règles simples prennent encore trop de vies. Conduire n’est pas quelque chose d’anodin.

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Isabelle David se dit particuliè­rement attentive à l’accidentol­ogie dans l’Orne.

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