Une blanchisserie accuse l’hôpital de concurrence déloyale
La blanchisserie industrielle Anett a attaqué la ville de Mayenne au tribunal administratif de Nantes. Anett reproche à la ville d’avoir préféré utiliser la blanchisserie de l’hôpital plutôt que son site.
Anett a attaqué en justice, mercredi 10 mai, la ville de Mayenne au tribunal administratif de Nantes, après qu’elle ait préféré en 2012 confier le nettoyage des vêtements de travail de ses agents à la blanchisserie de l’hôpital du Nord-Mayenne plutôt qu’à son site de Beignon (Morbihan).
L’entreprise privée - dont le siège est implanté près de Thouars (Deux-Sèvres) accuse l’hôpital public d’avoir « faussé le jeu de la concurrence » en chassant sur ses terres. Elle réclame donc près de 35 000 € de dédommagements à la ville de Mayenne, qui dirigeait alors un groupement de commandes commun avec sa communauté de communes.
Mais « aucun principe ne fait obstacle à ce qu’une personne publique candidate à un appel d’offres d’une autre personne publique », a rappelé le rapporteur public, dont les avis sont souvent suivis par les juges. Les collectivités locales qui voudraient se porter candidates à un appel d’offres peuvent simplement le faire uniquement si c’est « le prolongement d’une mission de service public » et que cela permet « d’amortir des équipements ou d’assurer leur équilibre financier ».
En l’occurrence, le nettoyage des vêtements de travail des agents de la ville de Mayenne et de ceux de sa communauté de communes est bien « un complément à l’activité de soins » du centre hospitalier, juge la magistrate. Sur le principe, elle a donc confirmé qu’il était bien en droit de postuler à un tel marché public.
La ville en passe d’être condamnée
Le rapporteur public a malgré tout suggéré, dans ce cas précis, de donner raison à Anett en raison d’une irrégularité qui aurait faussé le classement des offres. L’entreprise privée et l’hôpital public avaient initialement été départagés sur le volet environnemental : le site de Beignon se trouve « à 144 km des locaux municipaux, alors que l’hôpital est à 3 km ».
« Anett avait une chance sérieuse de remporter ce marché, et a donc droit à l’indemnisation de l’intégralité de son manque à gagner », en a déduit le rapporteur public. La magistrate n’a toutefois pas fait les mêmes calculs que l’entreprise privée, puisqu’elle a évalué ce chiffre à près de 4 500 €. Elle a aussi suggéré aux juges de condamner la ville de Mayenne à lui verser 1 500 € supplémentaires pour ses frais de justice dans cette affaire.
«L’hôpital compte 1 179 agents et 632 lits », a répliqué à l’audience l’avocate de la mairie. « Son activité est donc énorme, mais sa blanchisserie ne tourne pas à 100 % de ses moyens : 20 % des lits sont vides… Dans ce contexte, les vêtements de travail des 111 agents de la ville et de la communauté de communes ne représentent pour elle qu’une goutte d’eau ! ».
L’avocate de la ville de Mayenne s’est néanmoins dite satisfaite que le rapporteur public confirme au moins, sur le principe, que la blanchisserie d’un hôpital soit en droit de candidater sur ce type de marchés publics. « Je suis très contente qu’on permette aux centres hospitaliers de gérer un peu mieux leurs déficits », a-t-elle commenté. Le tribunal administratif de Nantes, qui a mis son jugement en délibéré, rendra pour sa part sa décision dans un mois environ.