Le Réveil (Le Réveil (Édition Bresle - Oise - Somme)

Françoise était la garde-barrière du quartier Sainte-Claire à Neufchâtel-en-Bray

Depuis 1988, le train ne passe plus au PN 78 du quartier Sainte-Claire à Neufchâtel-en-Bray. Mais Françoise, l’ancienne garde-barrière est encore là. Désormais, elle voit passer les cyclistes.

- • Laurent HELLIER

Un logement mis à dispositio­n par la SNCF Une garde-barrière particuliè­re

❝ Nous avons été heureux ici FRANÇOISE, GARDE-BARRIÈRE

Françoise Ancelot, c’est un sourire, un regard franc et brillant, beaucoup d’humour, une mémoire intacte et des wagons d’anecdotes.

Dans sa maison du passage à niveau numéro 78 située au quartier Sainte-Claire à Neufchâtel-en-Bray, Françoise voit passer chaque jour sur l’avenue verte des cyclistes, piétons et touristes venus du camping voisin. Autrefois, elle voyait passer les trains et gérait la circulatio­n des voitures.

En 1961 lorsqu’elle est arrivée ici avec son mari, elle était garde-barrière. Et c’était des trains qui circulaien­t juste sous ses fenêtres.

Garde-barrière au PN 78 à Neufchâtel­en-Bray

Vendeuse de poissons à Dieppe à la fin des années 50, Françoise a rencontré son futur mari « lors d’un mariage chez des cheminots où j’étais invitée ». Une soirée qui a bouleversé sa vie.

Françoise va rapidement quitter Dieppe pour rejoindre son Brayon préféré, Yves, du côté de Mesnières-en-Bray.

« Mon mari était maçon à Mesnières. Nous avons trouvé une petite maison avec une seule pièce ». Un début de vie à deux forcément modeste. « C’est ma mère qui a eu l’idée que nous devenions cheminots. C’était mieux payé que maçon et on avait la retraite à 55 ans », se souvient-elle.

En 1961, le jeune couple postule à la SNCF. Et banco ! Les voilà qui entrent dans la grande famille au printemps 1961. « Puis le district a proposé à mon mari que je devienne garde-barrière du poste 78 à Neufchâtel-en-Bray. J’ai dit oui en octobre 1961 ».

Le logement est alors mis à dispositio­n par la SNCF. Une maison située juste devant la voie de chemin de fer du quartier Sainte-Claire.

« On ne payait ni loyer, ni eau, ni électricit­é. Mais la paie était petite. Il y avait un jour de congé par semaine », détaille Françoise. Qu’importe, c’est ici que la famille de quatre enfants va s’agrandir. Quatre garçons élevés au bord de la voie de chemin de fer, c’est forcément un peu de stress et beaucoup de surveillan­ce.

Les trains de marchandis­es et de voyageurs entre Dieppe et Gisors se croisent quotidienn­ement. Dès 6h30 du matin et jusqu’à 21 heures. Françoise a encore tous les horaires en tête.

« Mais j’étais une gardebarri­ère un peu particuliè­re. Je n’ouvrais pas au passage du train, mais au passage des voitures qui se rendaient dans la rue en cul-de-sac. Elles devaient klaxonner pour que je leur ouvre même la nuit ».

Françoise est alors une sorte de concierge dans le quartier. « Quand le bouilleur de cru venait chez les cultivateu­rs, ça se faisait à l’abri des regards. Et je devais ouvrir la barrière au moins 80 fois par jour », sourit-elle.

Parfois la nuit, les automobili­stes tapaient au volet de la maison pour qu’on leur ouvre la route. « Je connaissai­s la vie de tout le monde » plaisante Françoise.

« Pour dix foyers qui habitaient ici, il y avait trois b+oulangers dans la journée ». Alors il fallait encore ouvrir la barrière.

Et parfois, il fallait aussi se méfier du danger. « Un jour, mon mari a couru et sauté le mur pour récupérer mon fils qui était sur la voie. Il fallait être prudent avec les enfants ».

Un autre jour, c’est une bouteille de bière jetée depuis un train qui a terminé sa course dans la fenêtre de la maison. « Elle a traversé le carreau », s’étonne encore Françoise.

Au milieu des années 70, le camping s’est installé. Et la barrière est devenue automatiqu­e.

Aujourd’hui, Françoise ne changerait rien à sa vie.

Et puis la carte SNCF était aussi un passeport pour les voyages gratuits. La famille a passé de nombreuses vacances dans la Creuse après de longs périples en train évidemment. « On passait par Saint-Lazare,

Vierzon, Montluçon et puis il y avait les petits trains de campagne » énumère Françoise.

Ultime avantage de la retraitée de la SNCF, elle bénéficie de bons de transport gratuit. « J’ai demandé à ma nièce qu’elle m’envoie du savon de Marseille. J’en voulais 5 kg. Mais ce n’était pas au détail. C’était minimum 50 kg. Alors j’ai du savon de Marseille pour un bon moment », sourit-elle.

 ?? Le Réveil ?? Françoise Ancelot a conservé le clairon qui alertait de l’arrivée du train au PN 78 à Neufchâtel-en-Bray.
Le Réveil Françoise Ancelot a conservé le clairon qui alertait de l’arrivée du train au PN 78 à Neufchâtel-en-Bray.

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