Unique en Europe, l’usine biogaz recyclera les déchets alimentaires des collectivités
Cette usine de recyclage des déchets alimentaires des collectivités pourrait fournir les besoins en gaz de 2 000 habitants. Elle est unique en Europe et sa mise en production et imminente.
epuis le 1er janvier, une nouvelle loi environnementale oblige les collectivités et les entreprises à traiter à part l’ensemble de leurs déchets alimentaires.
La région de Brezolles, le nord du département d’Eure-et-Loir, ainsi que le sud de l’Eure vont avoir la chance d’avoir à leur disposition une usine unique en Europe capable d’absorber leurs déchets.
Installée dans la zone industrielle de Brezolles, route Nonancourt, la société Easy utilise un procédé unique en Europe, la digestion anaérobie des biodéchets et la culture de microalgues pour épurer le digestat.
Hygiénisé, le digestat est transformé en un milieu de culture riche en NPK dans lequel est injecté le CO2 issu de la séparation du biogaz pour cultiver des microalgues.
Ce procédé à empreinte carbone est neutre car il n’émet aucun CO2.
DRessource nouvelle
En dégradant les biodéchets, le microméthaniseur produit du biogaz et des digestats solides et liquides. L’usine, dont la mise en route est prévue mi-février, pourrait fournir les besoins en gaz pour une ville d’environ 2 000 habitants.
Le digestat solide est amendé avec de la dolomie (ou des coquillages) pour être valorisé en terreau de surfaçage des sols ou de rempotage.
Le digestat liquide utilisé comme milieu de culture des microalgues, est valorisé en un biostimulant algal, un agent de croissance naturel qui permet d’accroître jusqu’à 30 % la qualité et le rendement des cultures.
Le process est établi suivant cinq étapes.
La première, le prétraitement des biodéchets. Ceux-ci sont pesés contrôlés, broyés en soupe avant d’être hygiénisés à 70 degrés.
La deuxième, c’est la méthanisation des déchets.
La troisième, la séparation des gaz. Le biométhane est injecté dans le réseau collectif de la commune. Le CO2 récupéré est injecté dans le milieu de culture des microalgues pour permettre leur développement par photosynthèse.
La quatrième, la séparation des digestats avec une phase liquide avec la récolte des microalgues qui sont concentrées en biostimulant.
L’étape cinq, le digestat solide est séché puis amendé avec des éléments minéraux pour être valorisé en terreau de rempotage.
Système au point
Le système, mis au point par la société Easy, permet de ne plus jeter mais de trier, de réduire les émissions de CO2, de produire une énergie verte et d’opérer en circuit court.
La société Easy est certaine de la réussite de son procédé. Lorsqu’elle a commencé a présenter son projet dans des salons internationaux, elle a eu la chance de croiser un riche propriétaire de haras de l’Émirat d’Abou Dabi, intéressé par son projet, voulant mettre en valeur les résidus de ses propriétés.
Après quelques années de recherche, notamment sur les souches de mi-algues résistantes aux hautes températures des pays du Proche-Orient, l’aventure devait être un succès.
Les deux créateurs, Christine Grimaux et Pierre Tauzinat, forts de cette expérience dans des conditions difficiles, pouvaient s’attaquer au marché français et européen.
Pourquoi Brezolles ? Eh bien tout simplement parce qu’ils habitent à Montmureau, petit village situé à quelques encablures de cette cité.
Résoudre la collecte des déchets
Mais pour faire fonctionner l’usine, il fallait des déchets alimentaires en nombre suffisant. Une autre idée géniale a été de créer, accolée à Easy, une coopérative de ramassage nommée Bioval.
Nombre de collectivités locales ou d’entreprises se sont déjà réunies en adhérant à cette coopérative.
Elle fera une collecte avec un véhicule léger dans un rayon de 50 km, un circuit court pour favoriser la compétitivité des coûts, la flexibilité de la collecte et éviter une logistique polluante.
Inciter et non contraindre
La raison d’être de cette coopérative d’intérêt collectif est d’inciter et non de contraindre, de pratiquer des tarifs abordables, de proposer des offres adaptées aux besoins des volumes à collecter, de la fréquence des enlèvements, de la taille des conteneurs.
La valorisation biologique des biodéchets, à un coût compétitif, est totalement transparente.
Les tarifs de collecte ne sont pas forfaitaires, mais indexés sur le nombre de conteneurs collectés. La coopérative met à la disposition de ses adhérents des conteneurs qui peuvent être relevés 1 à 3 fois par semaine. Le tarif de la collecte serait autour de 3 à 5 €, suivant la grandeur des bacs.
Les responsables de l’usine espèrent récupérer une dizaine de tonnes semaine en février, pour atteindre 21 tonnes en septembre et 35 tonnes fin 2024.
Les conteneurs pourraient être de couleur marron pour les déchets en vrac ou déconditionnés, rouge pour les déchets conditionnés ou périmés, une autre couleur pour les fruits de mer et les coquillages.
Emplois nouveaux
Si, déjà, Easy et Bioval ont sur place une solide équipe d’ingénieurs et de chercheurs dans des locaux situés impasse du Stade, l’usine devrait, dans un premier temps, créer dans les prochains jours trois emplois, puis quatre supplémentaires les prochaines semaines.
Le coût de Bioval est d’environ 2,5 M€. Le chiffre d’affaires espéré serait de 200000 € en 2024, 600 000 € en 2025 et 800 000 € en 2026.
La distribution des produits obtenus se fera en vente directe pour les exploitants agricoles et pour l’agroécologie ou encore par les coopératives agricoles.
Les particuliers, eux, devraient trouver les produits auprès de distributeurs divers.
Un homme et une femme
L’usine a vu le jour grâce à un apport de 50 % de fonds propres, de l’aide de la BPI (Banque publique d’investissement), France active, de la Caisse d’épargne, du Crédit coopératif, et de la région Centre-Val de Loire.
Cette aventure et ce projet sont nés de la rencontre de deux personnes. D’une femme, Christine Grimault, spécialiste de marketing et de stratégie environnementale et d’aménagements territoriaux. Puis d’un homme, Pierre Tauzinat, spécialiste des transferts de technologie. Ils assureront en commun la direction de cette entreprise.