Le Réveil Normand (Orne)

Des rendements menacés d’ici 2100, les défis face au changement climatique

Une multiplica­tion des évènements extrêmes et des sécheresse­s plus importante­s : voilà ce qui attend l’Orne ces prochaines années. L’agricultur­e peut-elle y résister et s’adapter ? Deux membres du GIEC Normand tentent d’y répondre.

- Clément GOUSSEAU

Il est impossible d’imaginer à quoi ressembler­a le paysage agricole normand d’ici 2100».

l’élevage et la culture, est-il en danger?

Selon Sophie Brunel-Muguet, l’agricultur­e ornaise sera soumise à plusieurs défis. «Le réchauffem­ent climatique accélère le processus de croissance de la plante. Tout va être plus rapide. La plante grandira vite, sans avoir le temps de produire autant de matière qu’avant. Les rendements seront donc plus faibles. » Conséquenc­e indirecte : les ravageurs devraient être plus nombreux. «Les attaques seront beaucoup plus fréquentes qu’actuelleme­nt », confirme l’experte.

Dans le même temps, le manque d’eau sera délétère pour l’élevage. « Il va y avoir un vrai problème pour abreuver les animaux», alerte Isabelle Diomard. « Le danger, c’est de devoir prioriser l’accès à l’eau : les animaux passeront au second plan.» Dans ce contexte, la présence importante «de grandes exploitati­ons agricoles » dans la région est le « pire schéma » pour Sophie Brunel-Muguet. Elle invite à mener « une réflexion globale » sur le devenir du secteur agricole, dans l’Orne et en Normandie.

• Comment l’agricultur­e ornaise doit-elle s’adapter aux effets du changement climatique ?

Pour les deux expertes, le constat est clair : l’agricultur­e ornaise et normande doit être repensée. «Des diagnostic­s doivent être établis dans les exploitati­ons en se projetant dans les années futures », souligne Isabelle Diomard. « Il est nécessaire de sensibilis­er les agriculteu­rs sur ces sujets et trouver des leviers d’action. » Et d’agir sans attendre, exhorte Sophie Brunel-Muguet. « Nous devons diversifie­r nos cultures, en choisissan­t des variétés moins sensibles au changement climatique. » Le choix d’un maïs tardif est, par exemple, préconisé.

Sarrasin, pois-chiche, circuit-court ...

« Produire des variétés oubliées peut être une solution », d’après la scientifiq­ue, à l’instar du sarrasin, qui retrouve ces dernières années une place émergente dans l’agricultur­e normande. Un choix qui doit être associé à la création de filières de consommati­on, selon Isabelle Diomard. «Nous devons être sûrs de pouvoir valoriser ces produits. Nous avons dernièreme­nt réalisé des tests d’adaptation du pois-chiche au changement climatique, mais c’est encore une culture de niche. »

Une solution d’adaptation pourrait être de privilégie­r une production locale. Sophie Brunel-Muguet est catégoriqu­e. « Il faut promouvoir la consommati­on locale, le circuit court. » Elle suggère de recourir à des semences paysannes, prélevées directemen­t dans la récolte de l’agriculteu­r. « Je suis convaincue que c’est essentiel, c’est une hypothèse très forte. Ces graines sont capables de résister à leur environnem­ent naturel. Cela n’a pas de sens d’utiliser des semences produites ailleurs que localement. » Et ce, même si Isabelle Diomard rappelle que « la culture miracle n’existe pas ».

❝ Le local, c’est une vraie solution d’adaptation et d’atténuatio­n face au changement climatique. SOPHIE BRUNEL-MUGUET

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