Le Réveil Normand (Orne)

Le président de l’associatio­n des Maires de l’Orne coupe court

Depuis le 16 mars et jusqu’au 15 août, la taille des haies serait interdite. Les profession­nels et même l’associatio­n des maires de l’Orne coupent court et expliquent que tout le monde n’est pas concerné. Débroussai­llage d’un texte.

- Thierry Roussin

’an dernier déjà, l’Office français de la biodiversi­té (OFB) avait publié ses préconisat­ions concernant la taille des haies. Faisant observer que depuis les années 1950, « 70 % du linéaire de haies a disparu y compris dans des régions bocagères », l’organisme veut nous faire comprendre que « les haies sont les championne­s de la biodiversi­té en milieu agricole. Quand elles sont bien gérées, elles peuvent accueillir jusqu’à 35 espèces de mammifères, 80 espèces d’oiseaux, 8 espèces de chauves-souris, 100 espèces d’insectes... ».

Dans sa communicat­ion, l’OFB encouragea­it alors, sans l’interdire, « les collectivi­tés, les profession­nels et les particulie­rs à éviter la taille des haies et l’élagage des arbres de début mars à fin août ». Ceci afin de ne pas déranger les oiseaux en période de nidificati­on. « L’enjeu est de taille car actuelleme­nt 32 % des espèces d’oiseaux nicheurs sont menacés d’extinction ».

L« Non, ce n’est pas interdit »

Dès lors, il a été considéré que durant la période entre le 16 mars et le 15 août il fallait laisser le taille-haie accroché au clou dans l’atelier. Ce qui n’est pas tout à fait exact. Nathalie Fréon, directrice de l’entreprise éponyme d’élagage, explique « qu’en fait l’interdicti­on de tailler les haies est faite uniquement aux agriculteu­rs bénéfician­t de subvention­s dans le cadre de la Politique agricole commune. Cela ne concerne pas les particulie­rs, ni les collectivi­tés ».

L’associatio­n des Maires de l’Orne confirme en s’appuyant sur l’article D.614-52 du Code rural qui « n’interdit par la taille des haies par les collectivi­tés et les particulie­rs ». Toutefois, le président des Maires de l’Orne fait observer « qu’ils doivent s’assurer auprès de la préfecture que la haie ne fait pas l’objet d’une mesure particuliè­re. En effet, au titre du droit de l’urbanisme, au titre du la protection de boisement ou encore au titre de la protection du patrimoine vivant, certaines haies peuvent être protégées ».

Philippe Van-Hoorne invite donc à la prudence en reprenant la recommanda­tion cette fois de la Direction régionale de l’environnem­ent, de l’aménagemen­t et du logement (Dreal), « de ne pas tailler durant cette période ». Attention, « car si l’OFB vient à constater que des travaux ont perturbé la nidificati­on, un procès-verbal peut être dressé avec de très lourdes sanctions à la clé ».

Spécialist­e de l’élagage depuis 60 ans, l’entreprise créée par Jean Fréon dénonce « une mauvaise communicat­ion sur le texte. On a l’impression que les collectivi­tés ou les différents donneurs d’ordres n’ont plus le droit de faire quoi que ce soit alors que c’est faux. Bien sûr qu’il faut faire attention, mais si on faisait mal notre travail ça se saurait ».

Nathalie Fréon ajoute que pendant la crise Covid, « l’entreprise a été autorisée à travailler parce que l’activité a été considérée comme étant essentiell­e. Ce n’est pas un hasard. Nous avons une réelle utilité sur le terrain ».

Sauf que l’OFB continue d’agiter la perspectiv­e de sanctions et les clients sortent le parapluie. « Plusieurs ont décidé de reporter les chantiers à septembre, mais on ne pourra pas être partout au même moment, c’est impossible ».

Pendant ce temps, le travail ne se fait pas et Nathalie Fréon laisse entendre que cela pourrait avoir des répercussi­ons durant l’hiver prochain. « Il va clairement y avoir un problème avec les chaudières bois des collectivi­tés. Certaines en cherchent déjà partout et avec tous les projets qui existent cela va devenir compliqué. Nous allons avoir une réunion de la filière bois très bientôt, mais c’est déjà un peu tard. Il aurait fallu avoir des clarificat­ions dès janvier ».

Elaguer l’hiver, pas toujours facile

A L’Aigle, adjoint au maire en charge du dossier chaudière bois, Jean-Marie Goussin assure qu’il n’y a pas d’alerte concernant l’approvisio­nnement. « Moins de 10 % du bois consommé par notre chaufferie viennent de la partie bocagère. Si toutefois nous avions un problème de disponibil­ité, nous pourrions compenser avec du bois d’autres origines, comme celui des forêts par exemple ».

Enracinée de longue date à St-Ouen-sur-Iton, l’entreprise Emery Paysages voit elle aussi un dérèglemen­t de son fonctionne­ment. « Il est important de dire que les collectivi­tés et les particulie­rs ne sont pas concernés par cette interdicti­on. Si tout le monde se met à avoir peur et à repousser les chantiers à septembre, on ne pourra pas être présents partout », analyse lui aussi Alexandre Emery.

« Avec les pluies qu’il y a eu durant la période hivernale, beaucoup de terrains n’étaient pas accessible­s et le travail n’a pas été fait. Si on ne peut pas le faire quand il fait plus sec, qu’est-ce qui se passe ? ».

Pour tenter d’améliorer le calendrier des entreprise­s, le président de la Cdc du Pays de L’Aigle, Jean Sellier, propose de réaliser l’élagage côté route en hiver. « Ce n’est pas vraiment applicable », réagit Alexandre Emery. « Ce n’est pas forcément le bon moment pour élaguer ».

Certains spécialist­es estiment effectivem­ent que l’arbre ne peut cicatriser les plaies d’élagage durant cette période et elles resteront à vif jusqu’au printemps suivant.

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